On me demandait parfois si ce n’est pas simplement un prénom de fille… On parle chaque jour des Rohynghias en ce moment. Est-ce parce qu’ils sont musulmans ? A-t-on jamais parlé du martyr des Karens par la Tatmadaw (l’armée birmane) martyr qui a duré plus de 60 ans ? Rien ne leur a été épargné : « diluez leur sang disait la junte. Exterminez-les jusqu’au dernier ». Jamais rien entendu sur les Karens en France…
Peuple venu probablement des hauts plateaux Tibétains, puis des montagnes du Yunnan en Chine, pour s’installer majoritairement dans le nord de la Birmanie et plus tard en Thailande, enfin au Siam. Karen Sgaw, Karen Pwo, Kayah… noms qui signifient de façon simplifiée : « les Hommes ». Tout au long de leur histoire les Karens ont été tributaires des états dominants qui les ont combattus et ont cherché à les assimiler. Conditions de vie différentes selon qu’ils sont du bon ou du mauvais côté de la frontière qui sépare la Thaïlande de la Birmanie.
J’ai tenté de décrire ce peuple dans mes deux romans « THEATRE D’OMBRES »* et « LA OU S’ARRETENT LES FRONTIERES »* … des personnages fictifs mais plus vrais que la réalité elle-même. Comme Lotus par exemple ou Phaw Thee (fleur d’eau en Karen) et dont je retrouve souvent le visage à chacune de mes incursions dans la montagne. « Pas jolie, l’adjectif est bien trop ordinaire, mieux que ça : grâce délicate, port de tête digne et douceur pleine de séduction » Comme Krissada, le guide fin et pur comme la lame d’un couteau, comme John « le chiqueur de bétel », comme Xavério le catholique, passeur de frontières. Comme ces fuyards qui se cachent dans la jungle, marchent dans la nuit et dorment le jour pour échapper aux patrouilles et à l’armée.
Peuple de la montagne, jaloux de sa langue et de ses traditions… leurs contes et légendes sont transmis oralement de génération en génération. Peuple rude qui craint l’assimilation de leurs enfants à la culture thaïe, celle de l’école tout d’abord puis de l’appel irrépressible de la ville avec la tentation de ses « malls » géants, de ses « Big C », de ses « Lotus » crachant leurs marchandises jusqu’à l’écœurement. « En ville ou morts, c’est la même chose » dit le chef de village Tha Bu Kho… « Une fois qu’ils sont partis, nos enfants sont perdus pour nous ils ont honte de nous et de notre culture »
*Les Editions de la fremillerie
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