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Un artiste qui « a la carte » : Daniel Buren à la Monnaie de Paris

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monnaiedeparie«  Avoir la carte » ou ne pas l’avoir, telle est la question ! L’expression est de Philippe Noiret qui l’aurait empruntée à son ami Jean-Pierre Marielle au sujet des connivences d’un certain milieu parisien : « Il y a un petit comité, disait-il, un jury clandestin, composé de gens influents des médias, du Monde, de Télérama, de Libération et deux ou trois outsiders, qui distribuent des cartes, dorées ou pas, assurant aux porteurs que quoi qu’ils fassent, pour leur plus petit pet, il y aurait de l’écho. Le coup de projecteur sera là. »


Le milieu du théâtre et du cinéma n’est pas le seul à être concerné. D’autres paraissent l’être tout autant, les médias eux-mêmes, l’édition, ou les arts plastiques.

 

S’il y en a un à avoir la carte, par exemple, du moins la carte institutionnelle, c’est bien l’artiste officiel Daniel Buren. Le Palais Royal, la Villa Médicis à Rome et actuellement la Monnaie de Paris, pour ne citer que quelques institutions prestigieuses, ont accueilli depuis vingt-cinq ans ses « créations » avec un égal appétit qui fait plaisir à voir, mais qui laisse le visiteur sur sa faim.

Le Palais Royal

On ne présente plus les colonnes de Buren qui, de l’aveu même de Jacques Lang, dans son dernier livre d’entretien, « Demain comme hier » (1), ont servi surtout à chasser les voitures des conseillers d’État de la si belle cour du Palais Royal. Au moins ont-elles eu une utilité pratique de plots dissuasifs à défaut d’embellir les lieux. Leur inconvénient – on ne l’aurait pas cru – est leur vieillissement précoce. Elles ne sont plantées que depuis 1985 : or voici qu’elles doivent déjà faire l’objet d’une restauration à grands frais, comme on le voit aujourd’hui en traversant le Palais Royal. Elles ne rivalisent donc pas en pérennité avec les colonnes de Paestum, de l’Acropole d’Athènes ou de la vallée des temples d’Agrigente, dont 25 siècles dans les jambes ont si peu altéré le galbe. Mais sous climat tempéré, les rayures de zèbre doivent mal supporter les intempéries.

La Villa Médicis

De même, en 2000, qui était invité à la Villa Médicis de Rome pour une mémorable exposition, dans le cadre de « la Mission nationale pour la célébration de l’an 2000 », intitulée « La Ville / le Jardin / la Mémoire » parmi une trentaine d’artistes, architectes, paysagistes et même, oui, « promenadologues » (sic) ? Mais Daniel Buren bien sûr ! Il avait eu droit à la cour d’honneur pour y dresser, autour de l’obélisque, face à la ravissante loggia Renaissance abritant une copie du « Mercure » de Jean de Bologne, de bien plats panneaux à miroir, zébrés, comme il se doit, puisque sa tendresse pour le zèbre est sa marque de fabrique.

Il avait appelé ça « Cabane éclatée pour un obélisque ». Pourquoi pas puisqu’il n’y avait pas de toit ? Quel autre abri peut d’ailleurs accueillir un hôte aussi encombrant ? Amusés, les hauts pins parasols eux-mêmes se poussaient du coude en se penchant pour se mirer dans les miroirs. C’est à peu près tout ce qu’on en a retenu. Mais, il faut l’avouer, cette « œuvre » était la moins insupportable de toutes, à côté des autres comme ce fagot insensé de tuyaux d’arrosage multicolores sous lequel disparaissait la délicieuse fontaine Renaissance, ou cet écheveau fou de « 9 kilomètres de cordelette », disait le programme, qu’ « une artiste » irakienne avait dévidé entre les troncs d’une dizaine de pins.

La Monnaie de Paris

Depuis le 24 juin et jusqu’au 27 septembre 2009, c’est La Monnaie de Paris qui, cette fois, accueille l’artiste officiel et ses zébrures pour « un travail » dit « situé », appelé « Pergola », annonce la bannière sur la façade de l’institution, quai Conti. De quoi est-il question, à en juger par ce qu’on voit dans la cour ? D’une estrade assez ordinaire somme toute, sommairement couverte de vitres de couleurs posées sur une charpente aussi sommaire, composée de minces linteaux soutenus par d’aussi minces poteaux, aux couleurs fétiches alternées du maître, le noir et le blanc.

On dresse ce genre d’abri provisoire dans les foires en guise de corridor d’honneur menant à une tente de réception réservée aux personnalités. Le terme de pergola n’est pas impropre, sauf, que sauf erreur, ce genre de châssis squelettique ne sert que de support en général dans un jardin à des plantes grimpantes, comme une glycine, sous lesquelles, pour leur magnificence, il tend par vocation à disparaître. Ici, foin des plantes et gloire au châssis dans toute sa nudité et sa sécheresse que les couleurs ne tempèrent guère ! La bannière offre une perspective bien trompeuse pour tenter de donner à cette allée abritée fort banale une approche qui intrigue.

Non, comme avec les colonnes ou les panneaux à miroir, on s’en retourne, une fois plus, en haussant les épaules quand on est capable d’ironie, ou en serrant les poings, fatigué d’ être pris encore une fois pour un demeuré par des institutions et leurs artistes officiels qui n’ont rien à dire, mais qui ont « la carte ».

(1) Jack Lang, « Demain comme hier », éditions Fayard, 2009

 

 

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