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Impressions d’une Strasbourg insolite

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Un voyage en Alsace… Destination Strasbourg… et impressions d’une Strasbourg insolite, sillonnée par des milliers de vélos, des bateaux mouches, des congressistes…

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Est-ce que ces trois photographies représentent réellement des espaces intermédiaires ? Ce sont plutôt des interstices où je peux glisser un coin pour entamer le bois de mes souvenirs et le faire éclater.

J’étais venu à Strasbourg pour une semaine. Le temps de présenter les dossiers de tous les itinéraires culturels aux Comités compétents du Conseil de l’Europe. Et de me sentir touriste dans la ville où j’ai vécu cinq années en continu et où je vais revenir d’ici peu de temps.

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J’en ai été le citoyen heureux. Je tiens à le redevenir !

Le platane qui puise toute son énergie d’ans l’eau de l’Ill est énorme. Un monstre sous lequel j’ai apprécié un dîner entre amis dès les premiers jours où je suis devenu Alsacien, en 1992. Le restaurant qui est venu s’y abriter se nomme « Le petit Bois vert ». Une sorte de symbole involontaire, dans la mouvance mi-touristique, mi-onirique de la Petite France.

Il est vrai que le paysage urbain qui a été créé là bénéficie d’une conservation attentive qui reste pour moi une étrangeté, voire une bizarrerie, dans un horizon mobile où tout se détruit et se reconstruit. Les maisons à colombages sont placées les unes à côté des autres, comme intangibles, face à une poursuite vaine de la nouveauté.

Comme si le temps, croqué par Hansi et ses amis, arc-boutés contre l’Allemagne voisine et ennemie éternelle, avait impressionné à jamais la pellicule de ces verres sensibles que mon instituteur faisait glisser dans un projecteur dont la lumière oscillante aimait la figure paternelle de Charlemagne qui succédait à celle de Charles Martel. Dans cette suite logique de l’identité française, l’Alsacienne en coiffe et ses oies, regarde les cigognes d’un air innocent. Elle est à peine troublée par les transgressions que Tomi Ungerer lui propose en révélant ses fesses roses.

A Strasbourg, où mon appartement regarde d’un air narquois les passages des bateaux mouches, j’ai acquis l’impression d’être à l’abri des atteintes du temps. En fait c’est le temps immobile que cette ville offre aux touristes. Les décors qui s’offrent à moi quand j’ouvre les fenêtres appellent une mise en scène où les personnages de la choucrouterie vont venir présenter leur ultime sketch en Alsacien sur la « Grande Catherine » – Catherine Trautmann, cette femme qui a su faire face au Front National de la manière la plus ferme et la plus ludique qui soit.

Je me souviens de ce défilé citoyen et impressionnant et du nettoyage de printemps qui a suivi, pour débarrasser le Palais des Congrès de l’atmosphère glauque et fétide et des stupidités clinquantes de l’armée des adeptes de la préférence nationale.

J’ai accepté volontiers, pratiquement pour la dernière fois, d’être touriste dans ma ville. Une fois de plus, mais l’ultime, dans cette période intermédiaire de ma vie où le Luxembourg m’accueille en immigré privilégié. Un touriste plein de souvenirs et fatigué des distances qu’il parcourt en Europe chaque semaine.

Mais ma ville, comme Bucarest ou Paris…ma ville parmi les trois préférées, valait bien un hommage, dans la mouvance immobile des cyclistes allemands qui ont franchi le Rhin pour venir se la couler douce.

Une ville douce, c’est vrai ! Et qui n’a plus d’ennemis.

Michel Thomas-Penette

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