On vous demande pourquoi vous voyagez.[…] On peut donc voyager non pour se fuir, chose impossible, mais pour se trouver.
Je voulais parler de mes émotions de voyages, mettre en lumière des paysages , choisir la magie d’une île, le vertige d’une ville, le silence du désert… Chaque ailleurs est un voyage , un vivier d’émotions. En parcourant mes albums de photos en voulant faire un choix, finalement se sont les regards, les enfants, les personnes rencontrés qui encore aujourd’hui me procurent les plus belles émotions. Pour innover cette série je vous laisse découvrir ces visages guatémaltèques que j’ai immortalisé avec leur consentement.
Emotions de voyages : des visages, des regards, des gens…
Pourquoi voyager?
On vous demande pourquoi vous voyagez.[…]
Le voyage devient alors un moyen[…]
Il est donc bien vrai que dans ces immenses solitudes que doit traverser un homme de la naissance à la mort, il existe quelques lieux, quelques moments privilégiés où la vue d’un pays agit sur nous, comme un grand musicien sur un instrument banal qu’il “rèvèle”, à proprement parler, à lui-même. La fausse reconnaissance, c’est la plus vraie de toutes: on se reconnaît soi-même: et quand devant une ville inconnue on s’étonne comme devant un ami qu’on avait oublié, c’est l’image la plus véridique de soi-même que l’on contemple.
Les grands paysages lumineux de Toscane et de Provence…
La baie de Naples,les terrasses fleuries de Capri, de Sidi-Bou-Saïd…
sont propices entre tous à ces révélations…
La beauté des grands paysages n’est pas proportionnée à la puissance de l’homme…
Pourquoi dit-on d’un paysage ensoleillé qu’il est gai ?
Le soleil fait le vide et l’être se trouve face à face avec lui-même- sans aucun point d’appui.
Partout ailleurs le ciel interpose ses nuages, ses brouillards, ses vents, ses pluies et voile à l’homme sa pourriture sous le prétexte d’occupations et de préoccupations…
Jean Grenier, in “Les îles”, les îles fortunées, l’Imaginaire Gallimard
Voilà quelques jours que je suis à nouveau plongée dans les mots de Grenier et
de Camus, jamais je ne m’en lasse ,trouvant à chaque relecture un nouveau questionnement propice à ma réflexion ,et Valéry vient compléter ma démarche sur
ma quête,mon attrait, mon impuissance.
Portes…
De tous mes voyages intérieurs
Combien de fois ai-je frappé aux portes,
A toutes les portes
Et toutes mes erreurs
Furent les portes de la découverte
Combien de portes se sont fermées
Pour laisser d’autres s’ouvrir
Je perdis tellement de temps
A contempler les portes fermées
Que je ne vis pas celles
qui venaient de s’ouvrir
Le chemin fut bien long
Avant de parvenir à la mienne
D’en franchir le seuil
Sans hésitation
Alors aux portes de la nuit
J’entendis la conversation des poètes
Et doucement avec mes mots
J’ai ouvert des portes sur la mer…
Evasion entre soleil et ombre…
Souvent l’envie d’évasion me prend, le Maroc est une destination que j’aime tant pour la beauté et la diversité des paysages que l’accueil chaleureux de ses habitants.
Quand j’évoque Marrakech je ne me souviens que du beau côté de cette ville envoûtante.
Je revois la place Jemaa el Fna et ses conteurs, la Koutoubia, la Ménara ce pavillon recouvert de tuiles vernissées vertes, les venelles où j’aime me perdre, les échoppes des souks, les riads, la foule bigarrée, les jardins de Majorelle au bleu éclatant, le murmure des fontaines, la Mamounia.
Hélas il y a le côté ombre de cette ville, de ce pays, l’enfance exploitée. Ces jeunes filles mineures réduites à travailler comme « petite bonne » ce qui les ravale au rang d’esclaves domestiques . Ces enfants des rues analphabètes pour la plupart qui se livrent pour subsister à la prostitution, au travail difficile dans les tanneries, l’artisanat…
J’aimerais que l’on se souvienne d’eux, quand éblouis par la beauté du pays, nous, nantis, arrivons si facilement à oublier la souffrance qui nous entoure. L’enfance ce miracle, ce moment qui devrait être celui privilégié de l’insouciance, qui fait de nous des adultes heureux ou malheureux.
Repères :
40% de la population a moins de 18 ans
48% des + de 15 ans sont analphabètes
600 000 enfants de moins de 15 ans travaillent
La loi les défend, reste à l’appliquer(photo trouvée sur la toile)
Une part d’ailleurs…
Entre deux mondes le temps du voyage des mots écrits à l’encre bleue,
des lignes qui se relisent, légères, le fil qui se perd.
Des phrases comme une musique.
Juste pour dire le chemin et les jours qui passent.
Juste pour qu’on les écoute.
Juste pour l’encre de la plume, le timbre, l’enveloppe sous les doigts qui explorent
les reliefs.
Juste pour les yeux qui suivent les volutes des lettres et s’y perdent.
Juste comme preuve de matérialité, comme aveu de proximité.
La réponse dans la nuit.
Le texte qui rend plus proche au fur et à mesure qu’il s’étend sur la feuille.
Le mouvement de la main qui s’applique, les signes qui se tracent doucement,
comme une caresse.
Le temps qui se prend.
Et puis l’enveloppe qui chute dans la boîte aux lettres. Irréversible.
Cette part de soi qu’on confie, qu’on abandonne, juste avant qu’on ne s’endorme.
Et puis ce lendemain auquel on croit.
Un peu de toi qui m’attend.
Invitation au voyage…
A défaut de pouvoir voyager en ce moment alors que la grande bleue m’attend,
( m’attendait), je fais le plein d’escapades virtuelles , rêvées ou vécues.
Je viens de recevoir au courrier la revue Connaissance des arts , ce mois elle nous invite aux plus belles expos de l’Eté et la couverture représente avec éclat la toile
d’ Albert Marquet qui est à elle seule une invitation au voyage…
« La citadelle à Tanger », toile exposée dans « Orientalisme » à Marseille jusqu’au 28 août.
Rien que pour cela j’aimerais prendre la route vers la « Cité radieuse «
Quelques minutes plus tard…
J’ai fait un voyage fabuleux, après une traversée au départ d’Algeciras me voilà à Tanger. Ville mythique, entre Europe et Afrique, où sous un ciel sans cesse balayé par le vent du détroit de Gibraltar, la lumière est reine, où le murmure de la ville s’écoute entre lumière et ombre, se lit à travers les textes de Paul Bowles, se regarde avec la troublante sensualité orientale fantasmée des peintres du XIXè et début du XXème siècle, se hume et se grise aux épices, parfums, cris et couleurs, invite à prendre un thé sur la falaise, au « café Hafa« sur la terrasse d’où la vue plonge à la rencontre de deux géants, la Méditerranée et l’Atlantique…
Grâce au tableau de Marquet je viens de faire un voyage fabuleux dans les souvenirs.
Au coeur de l’espace
Le Chant
Au coeur du chant
Le Souffle
Au coeur du souffle
Le Silence
Au coeur du silence
L’Espoir
Au coeur de l’espoir
L’Autre
Au coeur de l’autre
L’Amour
Au coeur du coeur
Le Coeur
Andrée Chedid, Rythmes
Souvenir et perception…
Dans le souvenir souvent précis jusqu’au détail c’était démesuré. Vaste champ de course, cour immense, terrain d’escapade, de cachette, d’embuscade.
On n’a pas grandi là.
Jamais ne se présenta l’occasion d’y revenir, de se mesurer peu à peu au lieu.
Voilà soudain qu’on y retourne adulte.
C’est un espace tout petit. Restreint, rabougri, rétréci. Tout est pourtant identique. On n’a pas de perception immédiate de notre changement de taille.
On considère donc spontanément que les choses ont changé, rétréci.
Tout d’un coup ici on a l’air d’être géant.
Le souvenir et la perception présente ne s’ajustent pas. Les deux sont vifs. Les deux sont incompatibles. On se sent en porte à faux, comme si on était de trop, entre notre mémoire qui a raison et notre présent aussi.
Ce qui encombre, c’est l’idée d’une continuité de nous-même.
Boulevard, plage de l’enfance, mes pas me portent vers ces lieux qui illuminent mes souvenirs.
La mer, le port, bateaux en partance pour de lointains voyages, poissons gris et nacrés en bans serrés ondoyant sous l’eau claire, murs éclaboussés de lumière, palmes frémissantes sous la brise légère, myriade d’étoiles se baignant dans la mer ceinturant mon île au large, grande, mystérieuse, lointaine, mon île au trésor.
Moments bénis qui permettent de marcher avec tendresse dans les pas de l’enfant que j’ai été…de le redevenir un instant dans ce passé présent conjugués.
Un thé au Sahara…
Une photo, des dunes à perte de vue et immédiatement reviennent en mémoire le désert algérien foulé il y a si longtemps, et puis aussi les images et la musique du film de Bernardo Bertolucci étincelante adaptation du roman de Paul Bowles .
Hier dans un des commentaires de mon blog étaient évoqués Paul Bowles et Bertolucci dans un” thé au Sahara”
Histoire d’une inquiétante étrangeté celle de trois danseuses qui voulaient boire
le thé dans le Sahara.
Un jour elles achètent une théière, un plateau et trois verres, et se joignent à une caravane qui descend vers le sud. Arrivées aux grandes dunes au coucher du soleil, elles grimpent sur la plus haute pour y prendre le thé avec vue sur le désert. Parvenues au sommet, elles aperçoivent une dune encore plus haute et décident de s’y rendre. Et ainsi de suite jusqu’au matin. Quand elles atteignent enfin la dune culminante et s’installent pour le thé, le soleil est à midi.
“Beaucoup de jours plus tard, une autre caravane passe et un homme voit quelque chose sur la plus haute dune. Et quand ils montent voir, ils trouvent Outka, Mimouna et Aïcha qui sont toujours là, dans la même position. Et les trois verres sont pleins de sable. C’est comme ça qu’elles ont pris leur thé au Sahara. ”
Paul Bowles “Un thé au Sahara” page 36 L’imaginaire Gallimard
Comme ” Port ” le héros du roman, c’est la fièvre du voyage qui nous amène vers le désert mais lorsqu’un homme y a subi le baptême de la solitude,
” aucun autre endroit n’est pour lui assez fort “
Balade à bicyclette…
Quand on partait de bon matin, à bicyclette…
Je me souviens du chatouillis dans les narines, de l’éternuement provoqué par l’éparpillement des pistils, et cette couleur jaune au ras de mes pupilles louchant.
Je l’avais encore dans les jambes, ce preux destrier, j’entendais sa roue avant,
celle qui faisait « tchac-tchac » à chaque révolution, s’épuiser doucement, l’herbe
virait au bleu, le front emmêlé dans un champ de soleils.
Je m’étonnais de leur manque de chaleur, je pédalais encore mais avec une légèreté infinie, poussant du front les astres, avec juste ce bruit familier m’accompagnant dans le vide sidéral lorsque j’entendis un bruissement à mon oreille gauche, bruissement qui enfla, éclata, tonitrua, zébra mon tympan et cassa l’azur.
Je reconnus Jeannot, mon pote, penché sur moi qui murmurait, l’œil en guimauve, étonnamment tendre : ça va ?
C’est cette douceur dans le ton de sa voix essoufflée, de ces douceurs souples qui
vous frôlent et vous enveloppent sans vous étouffer, de ces douceurs glissées
comme un drap d’été sur le corps pour protéger la pudeur, c’est cette douceur
inhabituelle qui m’inquiéta.
Délaçant à regret ma joue de la Grande Ourse, mais gardant un firmament à
triturer entre les dents, j’amorçais subtilement l’atterrissage,
le nez dans les pissenlits.
Art de vivre…
Dehors un mince rayon de soleil perce la grisaille automnale,
alors faisons un rêve …
C’est l’heure où l’atmosphère est au calme.
La chaleur de l’après-midi s’estompe, le premier souffle de l’Atlas caresse la plaine d’une brise rafraîchissante. C’est l’heure du thé à l’ombre des orangers d’un vaste patio, on respire le parfum presque entêtant des jasmins qui s’élancent jusqu’au plus haut balcon du palais.
Le thé est brûlant comme les sables du désert, une main agile tient la théière qui monte vers le ciel, le divin liquide coule en cascade avec une précision diabolique dans les verres, quelques pignons pour ajouter au plaisir. Sur le plateau, des dattes, des douceurs au miel, aux amandes, aux pistaches.
Dans le jardin intérieur du riad, l’heure est à l’apaisement, à l’enchantement, au charme insaisissable et émouvant de l’hospitalité marocaine.
Vous reprendrez bien un peu de thé ?
Voyage immobile
« J’aime que la musique ne soit pas sourde à la chanson du vent dans la plaine, ni insensible aux parfums de la nuit. »
Vladimir Jankélévitch, in Quelque part dans l’inachevé.
Elle se sentait vide, la maison était bien calme depuis qu’ils étaient tous partis en vacances, elle qui aimait le calme, la solitude, elle se sentait tout d’un coup bien seule avec elle-même, elle ne parvenait même pas à réfléchir comme elle avait l’habitude de le faire.
Elle allait de livre en livre très différents les uns des autres, butinant de page en page, se laissant guider par le plaisir des images suggérées, des parfums, de la musique des mots.
Elle voyageait assise derrière son bureau, dans un monde imaginaire, donc idéal, et comme il pleuvait, le mauvais temps déculpabilise, sa petite voix ne lui disait pas, « sors il fait beau dehors ».
Elle ne s’ennuyait pas, elle n’était pas triste, elle laissait juste le temps s’écouler plus doucement encore qu’à son habitude.
Elle avait une longue liste de choses à faire, par exemple ranger son placard, un placard est une source de labeur infini, une garde-robe est un véritable album souvenirs à elle toute seule, mais aussi une infirmerie si l’on considère le rangement comme une psychanalyse.
Plier les pulls, les aligner, les trier, se souvenir, donner, garder.
Il y a les habits que l’on conserve parce qu’ils rappellent un moment important, un premier baiser peut par exemple sauver la vie d’un tailleur démodé, un parfum sur une robe, rappeler un panier de pétales de rose, un champ de coquelicots qui danse avec le vent, ce petit pull rayé marine et blanc,des jours heureux au bord de la mer.
Le ciré était là lui tendant les bras…
Il est des lieux…
Il est des lieux où souffle l’esprit…
Il est des lieux qui tirent l’âme de sa léthargie,
des lieux enveloppés, baignés de mystère,
élus de toute éternité…
Maurice Barrès, La colline inspirée
Il est des lieux… en relisant ” Le vent à Djémila” Albert Camus
Voyage intérieur…
Je ne suis jamais aussi sincère
que lorsque je suis dans le rêve,
l’anticipation bénie de la réalité.
Jamais aussi spontanée,
limpide, chatoyante,
que dans l’imaginaire de la rencontre.
Quand il n’y a encore rien
et que tout est déjà là,
dans la palpitation émue
d’un présent qui ose s’inventer.
Le chemin alors s’ouvre sur une liberté
incandescente, rayonnante.Les mots dansent, s’agrandissent,
viennent se déposer au gré de mes attentes.
Alors ils deviennent spécialistes de l’amour,
ils savent décrire les émerveillements,
les soleils et les scintillements bleus.
Mais aussi les pièges, les violences
et les malentendus…
Il m’est parfois nécessaire de me taire pour que ma parole soit juste…
Chassé … Croisé …
Atterrissage sans difficulté.
Me voici propulsée dans ce vaste aéroport, où tel des fourmis nous sommes happés dans un bruit insoutenable.
Brouhaha, sons, mots prononcés en toutes langues, une véritable tour de Babel où chacun cherche à se faire comprendre par le langage des signes, quand les mots
dans la langue du pays sont inconnus.
Que suis-je venue faire ici ?
Un voyage initiatique à la recherche de mon identité ?
Moi qui suis née, ne connaissant rien sur mes origines,
juste ce mot tracé d’une croix dans un dossier indiquant
que j’avais été abandonnée…
Mes recherches longues et vaines pour aboutir à cette
unique trace qui m’emporte jusqu’ici dans ce pays inconnu.
Je sors de l’aéroport, l’humidité et la chaleur me happent,
oui je suis bien au Guatemala.
Je regarde mes notes, hèle un taxi, lui indique la seule adresse que je connaisse dans cette ville grouillante et inhospitalière.
Je prends peur car le taxi m’éloigne du centre, nous passons sous un pont, à ma droite un bidonville, impossible pour le véhicule d’aller plus loin.
Je demande au chauffeur de m’attendre, lui glisse quelques dollars et me hasarde entre ces maisons, des taudis.
Les enfants nombreux aux yeux rieurs me suivent, ils sont hardis, le plus grand me conduit à l’adresse que je cherche.
Un vieux est assis sur la marche d’entrée de la masure, me regarde fixement. Comment lui expliquer ce que je cherche.
Par chance le gamin qui m’accompagne depuis mon intrusion dans le bidonville comprend mes quelques mots d’espagnol,
je lui explique que je cherche une femme, il traduit mes mots.
Je donne toutes les informations que j’ai, raconte brièvement mon histoire, ma recherche.
L’homme semble réfléchir, comprend et me dit connaître cette femme.
Mon cœur bat la chamade, peut-être vais-je enfin savoir !
Mais en me regardant il raconte, je saisis quelques bribes, l’enfant m’aide avec sa traduction, au fur et à mesure mes larmes coulent.
Elle est partie il y a quelques mois sans laisser d’adresse, disant qu’elle voulait aller en France,
depuis nul ne l’a jamais revue.
Atelier d’écriture
Mots imposés :
début du texte
« atterrissage sans difficulté »
fin du texte
« nul ne l’a jamais revu / e »
Vacances
Dans » vacance » il y a vide, vacuité, disponibilité
Pendant l’année elles sont sources de fantasmes innocents :
Je vais lire ce livre, j’irai voir untel…
Et avant de commencer, elles sont déjà dans nos têtes encombrées de désirs, de projets.
Nous entretenons aussi des désirs contradictoires, celui de trouver un peu de solitude, de silence, d’isolement tout en espérant se rapprocher de tous ceux que l’on ne voit pas assez le reste du temps.
Les deux nous sont nécessaires.
La réponse relève d’un autre rêve: avoir beaucoup de jours, les uns pour soi seul, les autres pour l’affection et le partage en famille, en couple.
En vacances nous retrouvons ce qui fait la trame de notre vie, la nécessité de choisir, l’art du compromis et la soumission au principe de réalité.
Le seul moyen de les bien vivre, comme dans toute situation, laisser venir nos fantasmes et trier parmi eux ceux dont il nous paraît jouable de faire des priorités.
Et si nous ne nous sommes pas trompés, nous passerons de bonnes vacances.
Les pierres sauvages…
Peut-être un peu de fatigue accumulée, ce besoin profond de silence, de me retrouver.
J’erre dans mes souvenirs, ceux de ces abbayes cisterciennes que j’aime visiter.
Ecouter les laudes à « Cîteaux », trouver au fond du vallon « Sénanque » et son éblouissement de violet, comme quelque chose d’irréel de pictural, ce champ de lavandes qui souhaite la bienvenue. Aller à » Silvacane » un soir d’été au concert et retrouver l’autre des trois sœurs provençales le « Thoronet » dont Fernand Pouillon parle si bien dans » Les pierres sauvages «
Puis terminer ma visite par « Fontfroide » qui dans ce vallon rocailleux des Corbières évoque une image biblique, le tout accompagné par les fugues de J.S Bach.
Le monde s’évapore autour de moi, je suis dans l’infiniment grand.
» Les pierres sauvages » de Fernand Pouillon architecte retrace sous forme de roman le journal du maître d’oeuvre qui édifia au douzième siècle en Provence l’abbaye du Thoronet exemple d’architecture cistercienne. Réflexion passionnée sur les rapports du beau et du nécessaire, de l’ordre humain et sur cet art qui rassemble tous les autres, l’architecture.
Toute ma vie j’ai quitté les chantiers, mais j’avais toujours un nouveau projet en tête, j’étais heureux. Et puis, souvent, je partais seulement pour quelques semaines ; j’allais retrouver d’autres travaux plus urgents. Ce soir ce n’est pas la même chose : au bout du voyage il n’y a plus rien, plus qu’à attendre le bon vouloir de la destinée, entouré de mes frères, et cet au-delà qui me fait peur « ( page 195/196)
Les chemins de la rédemption…
La fontaine est là, perdue au fond de la forêt.
Les premiers rais commencent à percer la brume.
La chapelle se cache au hasard de la campagne, se blottit au fond des bois.
S’isole sur les hauteurs d’une colline ou d’un pic, si petite que l’œil
les aperçoit à peine.
Aller à leur rencontre appelle volonté et effort.
Le trajet à lui seul est une épreuve.
Voilà les chapelles condamnées à leur solitude.
Les unes procurent l’émotion des ruines, leur cloche a disparu, les murs se lézardent, leurs tuiles tombent Certaines s’enfoncent de mystères, les autres veillent sur leur splendeur passée.
Roman, gothique ou baroque, chacune a son style. Il suffit de pousser la porte pour découvrir d’authentiques trésors.
Toutes ces richesses finiraient presque par leur donner un faux air de musée.
Mais leur atmosphère envoûte l’âme, j’y deviens pèlerin.
Le silence règne, seul les pas résonnent, puis soudain le tintement de la cloche,
me projette dans un autre temps, celui des campagnes.
« Sur les dix-huit kilomètres de route, on rencontre treize chapelles romanes, toutes dans ce style tibétain ou aztèque à quoi obligent, sur toute la surface du globe, les grandes terreurs primaires: Notre-Dame des Cyprès, Notre-Dame de L’ormeau, Sainte-Anne,
le Saint Bel-Homme, Notre-dame des Selves,le Martyr-Reclos,
la Vierge des Quatre-Chemins, Saint Auxile, et d’autres dont les noms ne sont que murmurés
et se transmettent de bouche à oreille, toujours transformés, jamais fixés, comme s’ils étaient destinés à appeler on ne sait quoi d’inconnu. » Jean Giono , Provence.
Le silence plus précieux que jamais…
Dans le monde bruyant qui est le nôtre, tout s’oppose à ce que nous trouvions le silence.
Il n’est pas une heure, une minute, sans que nous soyons assaillis, de l’extérieur comme de l’intérieur, par des pensées parasites, des messages, des injonctions.
Ce » train d’enfer moderne » que dénonçait Nietzsche, réduit toujours plus les limites de notre intimité, s’oppose au développement de l’esprit.
Comment savoir qui nous sommes, ce que nous désirons quand jamais ne cesse le vacarme ?
S’isoler chez soi ?
Partir dans le désert ?
C’est d’abord en nous que nous devons faire silence.
Les yeux se ferment, le souffle se calme et voici que s’étend, plus vaste qu’on ne pouvait l’imaginer, un espace où tout s’apaise et se régénère.
Les idées se clarifient, ce qui est bon pour nous est retenu, ce qui est mauvais est rejeté.
Un « besoin de recueillement et de tranquillité » qui sera , Nietzsche le prédisait, ce dont nous aurons le plus besoin dans les temps à venir…Photo Abbaye de Fontfroide en Languedoc
L’appel de la mer ; une invitation au rêve et au voyage
La mer, la mer…
“…Ce soleil,cette mer, mon cœur bondissant de jeunesse, mon corps au goût de sel et l’immense décor où la tendresse et la gloire se rencontrent dans le jaune et le bleu. C’est à conquérir cela qu’il me faut appliquer ma force et mes ressources. Tout ici me laisse intact, je n’abandonne rien de moi-même, je ne revêts aucun masque:
il me suffit d’apprendre patiemment la difficile science de vivre
qui vaut bien tout leur savoir-vivre…”
Albert Camus
La mer miroitant de tous ses camaïeux de bleus animés par les rayons du soleil qui viennent danser sur les vagues et se disperser en mille paillettes étincelantes.
La mer invitant à la baignade,ces noces de l’homme avec le monde, nager en harmonie avec les flots, se sentir sirène, avec une conscience aigüe d’un retour aux sources.
La mer, la nudité, les jeux du bain et du soleil, le temps immobile.La mer de nos vacances, de nos souvenirs d’enfance, la mer plaisir, la mer carte postale.
“La mer, la mer toujours recommencée” Paul Valéry
J’aime la mer,la mienne est la Méditerranée ! Comment ne pas l’aimer, ce serait folie.
S’asseoir sur le sable chaud, laisser son regard se perdre au loin sur cet infini, sur la douceur de ce clapotis argent ou azur qui finit par se confondre avec le ciel, instant de paradis volé qui ouvre la porte à tous les imaginaires , réveille toutes les envies d’ailleurs, tous les rêves.
J’aime les longues balades,marcher sur les plages de toutes les saisons, les ensoleillées, les douces,les chaudes,cheveux au vent qui donnent l’impression de vivre intensément, de faire pleinement partie de cette symbiose entre l’eau, le sable et l’air, appartenir à ce décor comme la mouette qui rit dans le ciel, le voilier blanc qui glisse au loin ,et où le bruit des vagues n’est qu’une forme de silence, mais aussi celles solitaires, quand le ciel est bas, quand la mer lâche ses vagues d’écume blanche comme un vaste troupeau de moutons pressés.
Et quand en fin de journée mon regard s’étire jusqu’à l’azur, tendu vers l’horizon lointain où sombre le soleil en se couchant, pour apparaître encore le lendemain, ailleurs, mais sur un horizon tout semblable… Relire face à cette Méditerranée, Noces,suivi de l’Eté de Camus, ces pages qui restent pour moi les plus belles que l’on ait consacré au bonheur de vivre au bord de cette Méditerranée.
“J’apprenais qu’il y avait en moi un été invincible”
Le seul mal, c’est de vivre loin de la mer…
Dans quelques jours, (encore toute une semaine) je vais retrouver celle qui me manque tant, que j’ai quittée début juin, la mer. J’ai tenu bon durant ces mois d’été où je m’étais juré de vivre à la maison comme si j’étais en vacances, pari réussi. Mais maintenant que la rentrée se précise, j’ai besoin de faire une cure d’oxygène, de retrouver la maison de mes rêves, celle du bord de mer.
Aujourd’hui je m’y vois, pourtant la mer est grise, les lames frangées d’écume se déchiquettent en dentelles sur les rochers de la grève, la nuit, la lune fait quelques pas de danse entre les nuages, et offre un prélude au goût de liberté à mes pensées folles qui soufflent dans ma tête comme le vent du sud.
Ni les images, ni les mots ne s’ajustent. Faire le point, changer de cap, hisser la voile, découvrir d’autres horizons.
Une mélodie teintée de mélancolie, des mots surgissent, ils s’échappent…
Quand je pleure des larmes de rêve,
leur goût salé sur mes lèvres,
tout mon corps est comme une grève au sable perdu,
repris par la mer qui bat derrière mes paupières …
le fracas des galets qui roulent derrière mes tempes…
et goutte à goutte de mer se recrée
mon rêve brisé qui ne veut pas mourir…
Mon île
Tout a commencé un jour de premier avril quand haute et fière de mes 4 ans j’ai découvert la mer, celle qui depuis ne cesse de me faire rêver et de voyager.
Je ne sais pas si je suis méditerranéenne, mais de ce littoral-là, oui, certainement. Je suis de ces collines, de ces couleurs, de ces parfums,de ces criques,de cette côte-ci ” d’azur”.
Là j’ai été heureuse .
Le paysage méditerranéen est un monde d’images, les temples grecs au soleil couchant, les pinèdes et les champs d’oliviers, les cyprès sur les routes de Toscane,le blanc cru des villes arabes,la villa Malaparte ce portrait de pierre à Capri, les ruines romaines de Tipasa, les ramblas de Barcelone,les jardins de Grenade…
Mes voyages m’ont menée tout autour de la méditerranée, en Espagne,au Maroc, en Tunisie, en Algérie, en Egypte, en Turquie, en Grèce, en Sicile, en Italie, en Corse… Je n’avais de cesse d’aller toujours plus au sud, de découvrir toutes ces civilisations qui partout ont laissé des merveilles, d’aller à la recherche des endroits dont les peintres,les écrivains,m’avaient fait rêver.
Je me suis égarée dans les villes, j’ai étouffé dans l’émerveillement, j’ai apprécié les places ombilics des villes,les cafés,les terrasses,exploré les ruelles brûlantes des médinas avec leur ombre et lumière,fréquenté les marchés espace d’échanges,y ai fait provisions de couleurs, de cris, de senteurs, d’épices, j’ai goûté les paisibles miracles des jardins dans la douceur du beau et la force du simple,j’ai visité les cimetières, une allée de cyprès, un mur d’enceinte, une porte qui grince,ils sont si beaux qu’il y a un bonheur a les visiter, à la proue des villes, là où la vue est la plus belle.
Et puis il y a les îles, la méditerranée est une constellation d’îles,mon île à moi est toute petite, c’est un gros rocher où j’allais accoster avec mon père à pédalo.
L’île de mon enfance
Non ce n’est pas elle,
je la laisse à Tintin et à son île noire
elle ne peut rivaliser avec
L’île de mon enfance, des jeux interdits
quand avec mon père nous l’accostions à pédalo ,
et que ma mère sur la plage s’inquiétait de ne pas nous voir revenir
Sauvage, battue par le vent,
elle me semblait tellement grande et mystérieuse
mais si belle…
Le paradis de la solitude
Si la solitude existe, ce que j’ignore,
on aurait bien le droit à l’occasion
d’en rêver comme d’un paradis.
Albert Camus, in “L’envers et l’endroit”
(préface)
crédit photo Philippe Charpentier
Carte postale
Le ciel, le soleil, la mer, avec en prime le souffle léger du vent dans les pins
Carte postale idyllique du coin où je me suis posée
après une balade dans les ocres de Roussillon
et les villages perchés du Luberon
Recommencer sans cesse
Faut-il que soit sans cesse à recommencer
Ce qu’on cherche et n’arrive jamais à saisir ?
Louis-René Des Forêts
N’y voyez aucune malice de ma part,
juste un petit clin d’oeil souriant
de ce petit paradis.
Contemplation
Vibrer sous la lumière, m’enivrer de bleu,
apprivoiser le mouvement perpétuel de la vague venant mourir sur les rochers,
entendre le souffle de la mer,me perdre à contempler le ciel, la mer,
m’étourdir dans ce pays de nulle part à observer la ligne d’horizon.
Être là, où le désir m’emporte, me perdre, aimer me perdre,
parvenir à me perdre dans cet espace indéfinissable, vertige, ravissement.
“La Méditerranée…
Par les lignes et les formes qu’elle impose elle rend la vérité inséparable du bonheur; l’ivresse même de la lumière n’y fait qu’exalter l’esprit de contemplation….”
Préface “Inspirations méditerranéennes” Jean Grenier juillet 1939
Il y a le ciel, le soleil, et la mer…
entre ombre et lumière… entre rêve et réalité… ” Eclaire ce que tu aimes sans toucher à son ombre “
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