Je vais prendre l’avion dans quelques heures, mon portable sonne. C’est la fille d’un ami étudiante à Science Po qui revient d’un court et premier séjour en Thaïlande. Elle m’avait demandé conseil avant de partir et je l’avais aiguillée vers le nord du pays. Elle me remercie pour mes recommandations (prodiguées en raison de sa jeunesse sinon je ne fais jamais ca). En quelques mots – je suis pressée – j’ai envie d’avoir ses impressions : Chiang Mai, Paï, Mae Hong Son, Koh Chang,,,, « J’ai aimé » me dit-elle. « Y avait-il beaucoup de touristes ? » je demande inquiète de la situation économique en Thaïlande. « Euh… beaucoup d’étudiants en cette saison » me répond-elle…une chose pourtant m’a choquée… » Je la presse de continuer. « Le nombre de vieux touristes sexuels avec de très jeunes femmes thaïes, un peu partout. » (Je reprends ses termes exacts). Je n’ai pas le temps d’expliquer ni d’entrer dans une discussion qui pourrait – non pas disculper l’attitude de ces « vieux », pour reprendre ses termes – mais la quasi obligation de filles pauvres qui n’ont trouvé que cette solution pour survivre, – souvent – elles et leur famille. « Je te donne ce que j’ai, tu me donnes ce que tu as »… est-ce que ça en fait un commerce équitable pour reprendre le terme à la mode bobo d’un certain commerce aujourd’hui ?
Je prends mon dernier café avant de vérifier si j’ai bien rangé appareils photos, bouquins, medocs dans ma valise… et coup d’œil rapide sur la presse. Une histoire de viol capte mon attention. Elle se déroule dans un village d’Afrique. Une petite fille de 11 ans, violée, en quelques minutes, par un riche de son village. Silence de la petite. Perte d’appétit, fièvre. Finalement le médecin diagnostique une MST. L’homme d’affaires est soupçonné d’avoir violé d’autres fillettes dans le village. Lorsque la petite l’accuse, la police, au lieu de l’arrêter – lui, le violeur – « retient » la fillette et sa mère au poste de police, les accusant de salir la réputation de la sommité du village ! Celui-ci s’en tire en promettant a la petite de lui payer des études. L’espoir pour elle de « changer sa vie », d’envisager un avenir meilleur. « Je ne veux plus le poursuivre » clame-t-elle. « Mais s’il récidive ?’ lui répond-on. « Alors je prie dieu pour qu’il ne soit jamais pris, car il ne pourrait plus me payer mes études »…..
village Karen pres de Mae Sariang
Rapprochement entre les filles en Thaïlande, prostituées occasionnelles pour survivre, et cette petite africaine ? Pas vraiment. Sauf peut-être en cherchant bien……Je pense que les jeunes thaïlandaises doivent prier Bouddha pour que l’économie occidentale ne se « casse pas la figure »… Mais si l’occident sombre, l’orient s’enrichit et les nouveaux touristes sexuels en Thaïlande sont chinois, japonais, coréens, saoudiarabiens, etc… On n’en sort pas.
Une autre image – pathétique – me revient à la mémoire : celle d’Yvan Levai invité chez Ruquier (l’animateur qu’on voit partout et qui se « gondole » en racontant des grossièretés sur les ondes… une sorte de Bourvil sans la poésie…). Il expliquait sa notion du viol « Quoi ! un viol c’est avec un couteau, une arme… » J’ai failli m’étouffer en l’écoutant. Il défendait son ami DSK, c’est son droit après tout, mais cela valait-il un livre de plus ? J’espère qu’il enverra ses droits d’auteur aux victimes de viol – avec ou sans arme – avec ou sans couteau –
Est-ce que la Thaïlande est un pays pauvre ? Non si l’on considère les chiffres de son économie (par rapport à la nôtre par ex) Oui si l’on regarde les disparités hallucinantes entre Bangkok et certaines provinces, entre « ammart » et « phraï »
« Pour son malheur ou son bonheur » (ceci n’est qu’une formule car que vient faire le bonheur là-dedans ? il vaudrait mieux dire « survie »), ce pays compte parmi les plus jolies femmes du monde. Alors à chacun sa monnaie d’échange dans un monde chamboulé et mené seulement par le fric. Mais n’en a-t-il jamais été toujours ainsi ?
Photos prises dans villages Karen-Thais pres de Mae Sariang
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