Jusqu’au 22 Août, à La Rochelle, Ernest Pignon-Ernest expose son travail : affiches, sérigraphies, objets de collection et oeuvres éphémères.. Un rendez-vous à ne pas manquer et à ajouter à votre agenda aout 2010!
C’est une exposition qu’hélas je ne pourrai aller voir (à l’Espace Encan à La Rochelle jusqu’au 22 août), rétrospective du travail d’Ernest Pignon-Ernest, alors je me console en lisant le catalogue, qui n’est d’ailleurs pas vraiment un catalogue, mais plutôt un recueil illustré de textes par une cinquantaine de personnes parlant de leur rencontre avec l’artiste, ou plus souvent avec son travail, avec une affiche aperçue ici. La liste va d’Edmonde Charles-Roux à Mahmoud Darwich, de Gisèle Halimi à Michel Onfray, de Fred Vargas à Jacques Henric. Certains textes sont des récits, d’autres des poèmes, un ou deux des essais; certains sont très explicites sur telle ou telle affiche, d’autres ne sont que des évocations, des sensations, des colères ou des joies…
Ce n’est pas un catalogue et c’est mieux qu’un
catalogue, c’est un compagnon idéal pour flâner (virtuellement dans mon cas) au milieu de l’oeuvre d’Ernest Pignon-Ernest. Le travail d’Ernest Pignon-Ernest comprend à la fois les sérigraphies originales, objets de collection, celles collées dans la ville, oeuvres éphémères, sa propre performance en les collant lui-même sur place, plus ou moins clandestinement, et les photographies qui documentent soit la performance, soit l’affiche in situ, et parfois les réactions des passants, ou en tout cas leurs attitudes face à ces images sur leurs murs. La conjonction de ces trois ou quatre modes, leur interaction et leur équilibre enrichissent la complexité de son travail, bien au-delà du street art habituel. En voici quelques extraits, images et textes.
Tout part, pour l’artiste, d’Hiroshima et de l’empreinte d’un corps sur un mur, corps disparu, désintégré, et sa première intervention, dont il ne reste aucune trace, est une empreinte de corps sur les roches et les murs du plateau d’Albion. Sa première oeuvre est un hommage aux morts de la Commune, dont le corps, anonyme et multiple, est collé sur les marches du Sacré Coeur, église expiatoire construite après 1871.
Henri Cueco en dit : “Les morts de la commune appartiennent à la multiplication des formes, à ce qu’elles portent au-delà de ce qu’elles présentent ou représentent. 
Quand le maire de Nice jumelle sa ville avec Le Cap au temps de l’apartheid, apparaissent soudain les affiches de ce couple noir avec enfants derrière les barbelés; un vrai camp de prisonniers en plein Nice, une mise en évidence du racisme. Comme le dit Georges Rousse “on retrouve cette sorte d’intolérance dans notre quotidien qui sans cesse régénère en moi le souvenir de la révolte éprouvée alors.”


Les ombres se rejoignent là-bas et forment un peuple en sueur… En ces terres, une chose est éternelle : le gémissement et la sueur, l’indécente beauté des 
Bien d’autres encore, les occupants de cabines téléphoniques, la dame de Martigues, le dessin de Brest (pour Genet), le voeu de Louis XIII d’Ingres à Montauban. 
Nulle photo de cet événement, nulle trace, rien n’en reste, bien sûr. Écoutons à ce propos Paul Virilio : “Ernest Pignon-Ernest est un des guetteurs du malheur à venir et son hommage à Mahmoud Darwich l’illustre singulièrement…Aujourd’hui le Mur murant la terre promise n’est jamais que la promesse d’un désastre sans retour”. Et Olivier Py, dernier à écrire : “Un visage, c’est ce qu’Ernest Pignon-Ernest fait d’un portrait quand il le confie au soleil, au vent, à la ville et aux foules. Darwich dans les rues de Ramallah c’est la place exacte du poète dans la souffrance de l’histoire et l’éblouissement du présent”. Toujours face aux murs…