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La revue 22 : une tribune pour le dialogue social en Roumanie

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Il y a 20 ans, au coeur de la fièvre post – révolutionnaire d’un nouveau début, la société civile roumaine commençait à bouger, en formulant ses premiers messages et en cherchant les moyens de s’exprimer. Dans ce contexte, le Groupe pour le Dialogue Social a vu le jour avant Noël 1990. C’était une des premières organisations qui avait sa propre publication, la revue 22, dont le premier numéro a paru le 20 janvier 1991. A l’époque, Stelian Tănase était son rédacteur en chef. Il se rappelle avec nostalgie les débuts de la publication, lorsque tout partait à zéro…

“C’était passionnant, parce que c’était la première fois que l’on faisait de la presse libre. Plus de censure, on pouvait écrire et dire tout ce que l’on souhaitait. Les membres du Groupe pour le Dialogue Social étaient des personnes très différentes, toutes tendances politiques confondues, des chrétiens et des athées, des sympathisants du pouvoir politique de l’époque et des gens qui s’y opposaient. Ils avaient des visions très différentes, ce qui donnait lieu à de très vifs débats. C’est pourquoi, dans les numéros de la revue, on essayait de réunir toutes les opinions exprimées et cela a remporté tout de suite un grand succès auprès du public. Les controverses naissaient de rien et chaque jeudi le numéro était analysé par les membres du groupe dans des rencontres très vives, avec des opinions pour et contre à propos de certains articles ou photographies. On essayait de maintenir cet équilibre si précaire entre les différents avis, parce que nous avions un souci de cohérence, qui lui était conférée par l’éditorial ou la principale interview de chaque édition”.

Malgré les débats au sein de la rédaction, la revue 22 s’est créé un profil spécifique et des lecteurs fidèles. Le tirage était lui aussi impressionnant. Qui étaient les lecteurs de la publication au début des années ’90? Ecoutons Stelian Tănase, son premier rédacteur en chef:
“Il y avait beaucoup de confusion en Roumanie, beaucoup d’ambiguïtés. On ne savait pas encore quelle était la direction que le pays allait suivre. C’était l’époque ou les opinions commençaient à se concrétiser et, en raison des polémiques au sein de l’équipe et avec d’autres publications, la revue a attiré un public hétérogène. Toutefois, d’un point de vue politique, c’étaient des personnes qui ne sympathisaient pas avec le Front du Salut National, au pouvoir à l’époque, et qui étaient en général contre le régime de Ion Iliescu. Par conséquent, la revue 22 était une publication d’opposition à l’époque”.

Au côté d’articles signés par des intellectuels prestigieux de Roumanie, la revue 22 publiait également des traductions des textes de référence appartenant aux dissidents de l’Europe de l’Est. Cette pratique faisait partie d’un programme plus ample du Groupe pour le Dialogue Social, dont nous parle Stelian Tănase:
“Je pense que son rôle principal a été de promouvoir l’image d’une revue libre de débat intellectuel sans censure et ce fut là une très bonne stratégie. Dans tous les pays de l’Est, ce moment ou ce préambule pédagogique a eu lieu avant la chute du communisme. En Roumanie, cela n’a pas été possible à cause de Ceauşescu. Or, la revue 22 s’était proposée de familiariser le public avec les idées provenant de la société civile. C’était notre rôle formateur, d’introduire dans l’espace public roumain des concepts que tout le monde connaît de nos jours”.

Aujourd’hui, la revue 22 continue d’être la tribune du Groupe pour le Dialogue Social, et par conséquent, une des plates-formes d’expression de la société civile, voire une des plus importantes… Elle a gardé les débats sur des sujets controversés visant les affaires publiques de Roumanie. Toutefois, les polémiques au sein de la société civile se sont calmées. Le profil du lecteur est resté le même, mais le tirage a baissé, comme ce fut le cas d’ailleurs de la plupart des publications roumaines. Le rédacteur en chef Armand Goşu nous parle du présent de la revue 22:
“La plupart des lecteurs ont migré vers la version électronique de la revue. On a encore un tirage de 10.000 exemplaires, soit beaucoup moins qu’au début de 1990. Aujourd’hui, ce tirage est toutefois impressionnant, comparé à d’autres publications roumaines. Nous nous enorgueillissons également de nos 2500 abonnés, car il y a des quotidiens nationaux qui n’ont pas autant d’abonnements. Par temps de crise, dans le contexte où plusieurs journaux ont cessé de paraître, cette revue (qui n’est financée par aucun groupe de presse) survit grâce aux efforts d’une petite rédaction de 5 ou 6 personnes, grâce à la bienveillance de ses collaborateurs (qui acceptent des sommes plutôt symboliques pour leur travail) et grâce aux lecteurs qui l’achètent ou y sont abonnés”.

Aut. : Christine Leşcu. Trad. : Valentina Beleavski

Radio Romania International

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