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Mineriada : La descente des mineurs roumains sur Bucarest (13-15 juin 1990)

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La descente des mineurs sur Bucarest, en juin 1990, s’est gravée dans la mémoire collective, étant conservée comme un des plus graves événements produits dans la Roumanie post-communiste, comme un attentat à la démocratie en train de renaître, après des décennies de communisme.

Le terme « mineriadă » désigne la descente sur Bucarest des gueules noires de la Vallée du Jiu à l’appel du Front du Salut National dirigé par Ion Iliescu, au pouvoir à l’époque. Comme Iliescu le déclara, les mineurs furent appelés pour sauver « le régime démocratique assiégé » et restaurer l’ordre et la démocratie à Bucarest.

13-15 juin 1990 – Mineriada

Mais la réalité était tout autre : utilisés comme des troupes paramilitaires, les mineurs ont été appelés par le chef de l’Etat pour disperser les manifestants anti-communistes qui occupaient depuis des mois la Place de l’Université, dans le centre-ville de la capitale. Connus sous le nom de « golani » – « voyous » en français, les protestataires, étudiants et intellectuels pour la plupart, réclamaient que les anciens membres du parti communiste roumain soient bannis des futures élections. Une exigence qui a mis en colère Ion Iliescu, ancien dauphin de Ceauşescu, et ses acolytes, et qui fit que nombre de Bucarestois innocents tombent victimes des mineurs agressifs et violents. Les 14 et 15 juin 1990, les gueules noires ont donné la chasse aux Bucarestois dont une centaine ont perdu la vie. Appuyés par les policiers, ils ont vandalisé les sièges des partis et des journaux d’opposition et ils ont harcelé les passants sous n’importe quel prétexte, ne serait-ce qu’en raison de leur barbe ou de leur jean. Plusieurs civils ont été placés abusivement en détention provisoire et plusieurs sont restés traumatisés à vie.

Deux décennies se sont écoulées depuis ces événements sanglants et les coupables sont toujours méconnus. Victime de l’immixtion politique, la Justice a tergiversé les procès.
Pour mieux comprendre les événements de ces années-là, nous avons demandé l’opinion de l’historien Adrian Cioroianu :
« Je pense que c’est un épisode spécifique à l’histoire roumaine. Les événements de décembre ’89 ont conduit à une accumulation significative d’énergie, négative pour la plupart, qui a encouragé la violence. Rappelez-vous, par exemple, toutes ces démonstrations organisées durant les premiers mois de démocratie. Ou bien les récentes marches de protestation. Or, selon moi, l’énergie négative stockée lors de ces premiers mois d’hiver 1990 a conduit petit à petit à ce que l’on connaît sous le nom de « mineriadă ». D’autre part, à cela c’est ajouté la manipulation des foules, spécifique d’ailleurs à tous les pays de l’ancien bloc communiste de l’Europe de l’Est. Car il est évident pour tous qu’il y a partout des personnages qui souhaitent profiter plus que les autres et qui se trouvent toujours à l’origine des événements ».

La marche des mineurs sur Bucarest, en 1990, a-t-elle été rigoureusement préparée ou a-t-elle représenté une stratégie du moment? Adrian Cioroianu:
« A mon avis, c’était un peu des deux. On ne saurait accepter l’idée que tous ces mineurs étaient des activistes déguisés de la Securitate. Mais il est tout aussi évident que parmi ces mineurs que l’instinct avait poussés vers Bucarest se trouvaient également des « professionnels » non pas de l’extraction du charbon, mais précisément de ces techniques de manipulation et de mobilisation des masses qui avait été testées pendant des décennies. Et il y a également eu, sans doute, des provocateurs parmi ceux qui ont tenu tête aux agresseurs. Je le répète, il est très difficile, dans l’histoire, de séparer le blanc du noir, car les deux extrêmes ont, bien souvent, des points de convergence insoupçonnés. Il est possible que parmi ceux qui ont incité à la résistance contre les mineurs ou provoqué l’attaque contre la Télévision il y ait eu des êtres exaltés dans le meilleur des cas ou dont l’intérêt du moment était de provoquer les forces de l’ordre. De même, dans les rangs des forces de l’ordre, il y a eu sans doute des personnes qui ont mis de l’huile sur le feu et qui ont poussé les mineurs à dévaster les sièges des partis d’opposition. Je ne puis m’empêcher de penser que l’intention de ces gens-là était, en fin de compte, de compromettre l’image plutôt favorable de la Roumanie après décembre ’89, qui s’est d’ailleurs détériorée très vite après les descentes des mineurs sur Bucarest ».

Plus que d’autres catégories professionnelles, les mineurs étaitent un des symboles communistes les plus importants. La propagande officielle utilisait leur image justement pour exhiber la force du régime. C’est pourquoi, les mineurs ont été intentionnellement utilisés par les anciennes structures issues du communisme – et notamment par l’ancienne police politique – pour servir leurs intérêts. L’affaire des mineurs descendant sur et sacageant Bucarest a assis sur d’autres bases la nouvelle démocratie roumaine post-communiste. Elle parle également de la manière dont les Roumains ont commencé à apprendre l’exercice démocratique. A qui ces « minériades », et notamment celle de juin 1990, ont profité ? La réponse reste floue, mais une chose est sûre – toute la société roumaine en a pâti et continue de le faire. (aut.: Steliu Lambru; trad.: Dominique, Ioana Stancescu)

Radio Romania International

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