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« Bouche sucrée » : arme fatale

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Cette note fait tout naturellement suite à celle d’hier concernant Pattaya et la prostitution. Elle est extraite de mon « journal d’une voyageuse » « Un autre  sac plastique pour un « farang » :  un visiteur australien de 52 ans a été retrouvé mort dans sa chambre d’hôtel de
Pattaya »…..voilà ce que je lis dans le  « Bangkok Post » d’aujourd’hui.

 

« Si l’on  s’en tient aux faits divers tragiques rapportés par la presse et les télévisions depuis quelques années, il y aurait, à Pattaya, en moyenne tous les mois, deux  à trois morts par suicide commis par des occidentaux, soit une trentaine par  an. Tous ne sont pas touristes, beaucoup sont résidents de longue date…. Comme partout ailleurs dans le monde, les  causes sont diverses : problèmes psychologiques, difficultés d’adaptation  à une culture étrangère sans possibilité d’alternative, manque d’argent  soudain, déception sentimentale, pressions socio-familiales… et parfois tout  cela en même temps »

 

**********

 

Tous les  touristes de retour de Thaïlande le disent : douceur et gentillesse sont des qualités typiquement thaïes. C’est une évidence de chaque instant. Le charme l’éclat des sourires et l’attitude réservée jusqu’à l’humilité, font vibrer nos sensibilités d’occidentaux. Tête courbée, regard baissé, donnent l’illusion de la soumission et du même coup titillent le sentiment de supériorité qui dort en
nous. Conscient ou non, il ne demande qu’à se réveiller.

 

Il y a quelques  décennies, nous étions les dominateurs, et eux peuples lointains – nous les considérions comme nos inférieurs. Mais nous n’avons pas colonisé le Siam. Alors cette déférence, envers qui s’exprime t-elle ? Le touriste à la peau claire ? Le « farang » supposé avoir l’argent ? …La couleur de la peau, tant enviée, et l’argent, tant convoité, jouent un rôle essentiel dans l’attraction
des Thaïs à notre égard, mais de là à conclure qu’ils sont nos « serviteurs » ! Grossière erreur que certains touristes n’ont pas toujours la possibilité, ni le temps de corriger.

 

Les Thaïlandais savent, d’instinct – plus que de raison, – qu’humilité et sourires, ajoutés à l’art du compliment, sont des armes parfois
« fatales » Parler pour faire plaisir est d’ailleurs plus qu’un art, c’est un devoir, une façon de vivre ou de survivre.

Il y a quelques  années, alors que j’aidais occasionnellement des professeurs d’anglais de Mathayom 2 à l’école « Sainte-
Mary » , une des jeunes élèves d’environ 13 ans, me déclarait tout de go :  « Teacher Michèle, I will love you for ever ! »

 

Déjà à son âge, la possibilité d’utiliser des mots dont le sens ne lui était sans doute pas encore familier, autrement que par les chansons américaines apprises phonétiquement ! Aussitôt, le professeur thaï me glissait, moqueuse, à l’oreille :

 

« Paak wouan
! »

 

Ce qui, littéralement, veut dire : « bouche sucrée ». Plus tard, je trouvais dans le dictionnaire la traduction exacte de « paak wouan »
: « Flatteur, flatteuse » A mon tour d’utiliser ce mot aujourd’hui, lorsque les compliments pleuvent trop facilement.
« paak wouan! paak wouan»! Ça les fait rire. Personne n’est dupe avec le temps !

 

Lorsque j’écris « bouche sucrée », armes fatales,  ces mots ne sont pas choisis au hasard, et je vais tenter d’expliquer pourquoi…

Pattaya …. Cet ex- petit village de pêcheurs sur le golfe de Siam, est devenu, en quelques décennies, Pattaya –la- sulfureuse. Ville de tous les dangers, de tous les pêchés, ville de tous les démons, dont beaucoup portent des masques d’anges. Pattaya est un centre touristique pollué de milliers de salons de massages et de bars aux noms les plus évocateurs : « blow job bar », « short
time bar
» ou « pussy bar »…
(Traduction pour les plus de 16 ans : « bar a pipes », « bar pour un coup rapide », « bar de chattes »…) L’air y est saturé
de néons gueulards, de vapeurs de plomb, de musiques cacophoniques et d’appels au sexe en tous genres. En un mot, Pattaya est au sexe ce que Las Vegas est au jeu ! Deux millions de touristes, asiatiques et occidentaux y viennent chaque année, et son taux de suicide y est étrangement élevé, comme le signale le « Bangkok Post ».

 

A Pattaya, ville la plus dangereuse de Thaïlande ou du monde, la mort peut être violente et inattendue : mauvais endroit,
mauvais moment, sous les tirs croisés de maffias coréenne, russe, iranienne ou thaïe ! Les crimes y sont souvent maquillés en suicides. A Pattaya, on meurt d’overdose de viagra ou du Sida, de chagrin d’amour ou …de désespoir.

 

Les « farangs » qui ont choisi cette ville – les amoureux de la Thaïlande l’ont rayée de la carte – sont pour la plupart retraités allemands, belges, australiens anglais ou japonais.

 

L’amour est le premier et le plus dangereux des virus qu’attrapent célibataires ou non, hétéros ou non, moins d’une heure après leur arrivée dans la cité. Les candidats à toutes les aventures (sexe sans protection, viagra à gogo, héroïne, amphétamine, ectasy au déjeuner et au diner !),  ou le touriste lambda, finissent toujours par tomber sous le charme d’une belle aux mots caressants. Premières rencontres, premiers verres, premières déclarations. « I love youuuuu » susurrent les lèvres voluptueusement enfantines.

 

En moins d’une
semaine, le « farang » est
ferré, coincé, foutu. Pour le meilleur quelquefois. Pour le pire
souvent. Il ne maîtrise plus sa vie,
mais ne le sait pas encore. Il est prisonnier d’un ange ou d’un démon à
l’apparence fragile qui  doit aider sa famille, élever un enfant, soigner
un père malade ou rembourser des dettes.

 

Le « farang » a bon cœur. C’est sa
réputation. Ça fait contre- poids avec le thaï gentil ! Il a surtout un fort sentiment de culpabilité
envers le garçon ou la fille qui a quitté la boue des rizières du nord ou du nord-est pour travailler dans
le vacarme de Pattaya, Phuket ou Koh Samui.

 

Le « farang » en vacances, paye souvent,
pour une seule nuit d’hôtel, l’équivalent d’un mois de salaire de serveuse ou
de réceptionniste. Alors, quelques milliers de bahts pour un fantasme qui se
fait réalité, ce n’est pas si cher !
La docilité, la douceur, le regard admiratif sont des denrées rares en occident, surtout
quand on a passé l’âge des premières romances. Ici, c’est à portée de mains, et
à toute heure du jour ou de la nuit. Pour beaucoup, c’est le paradis retrouvé,
tous les beaux commencements possibles, l’amour
avec une « presque » vierge ou vierge il n’y a pas si longtemps ! Le
départ d’une nouvelle vie avec femme et bébé… et, ce que le
« farang » n’a pas encore tout a fait réalisé : une famille thaïe qui
a toujours de gros besoins. Mais il est
heureux le « farang », et
il a raison ! Il est sincère, généreux, responsable… toujours sa réputation !
Surtout en Isan. Pas étonnant qu’il soit une denrée recherchée. Si j’avais pu
trouver un mari à toutes les filles et jeunes profs qui m’en ont fait la
demande, (j’ai envie de dire : « passé commande ») je serais
tenancière d’un club prospère. Mais je n’ai pas cette marchandise en magasin,
et n’ai pas envie de jouer les entremetteuses pour « love story »
exotique.

 

La période de
lune de miel entre le « farang »
et son épouse thaïe est plus ou moins longue. Elle dépend de la cupidité de la
belle et de sa famille et de son propre compte en banque.

 

Avant la
cérémonie de mariage, les obligations sont multiples. D’abord la dot (« Kha sin sot » (le prix de la
virginité), dont le montant est âprement
discuté et qui – quelle qu’en soit l’importance – est composée du plus grand
nombre de chiffres 9 possible (100 000 bahts
deviendront 99 999 bahts. Neuf étant le
chiffre porte-bonheur par excellence)

 

Vient ensuite
l’or, sous forme de colliers, bracelets, bagues, achetés quasiment au poids
dans l’une des nombreuses joailleries chinoises de la ville.

 

Enfin, la
maison. Aucun « farang »
n’a légalement la possibilité de posséder la terre thaïe. Se souvenir de
l’hymne national « chaque parcelle de cette terre nous appartient »…
Sage décision prise par le roi il y a très longtemps afin d’éviter
l’émiettement du pays. Le fait d’être marié
à une thaïe, ne fait et ne fera jamais du « farang » un citoyen à part
entière.

 

La maison donc est le « must » absolu conclu
avant toute union. Deux possibilités s’offrent alors au « candidat au
suicide » !! la création d’une société, propriétaire de la maison, et
dans laquelle il possédera
48 % des parts, ou l’achat de la maison au nom de sa femme. Le petit démon, sous les traits
de l’angélique épouse, dispose d’un arsenal d’arguments et d’armes contre
lesquels l’étranger n’est pas préparé, et qui vont le pousser à choisir cette seconde solution plutôt que la
précédente. Une issue qui risque de lui être fatale

« Si la maison n’est pas au nom de ma famille, c’est
la honte et la perte de face pour eux dans tout le village » !

 

« Tu ne m’aimes pas
vraiment » !

 

« Tu n’as pas confiance en moi,
pourtant nous sommes maris et femmes » !

Il
ya des comportements plus dissuasifs encore et beaucoup plus intimes, qui
vont de la bouderie à l’insulte… jusqu’à
certaines mesures, dont quelques unes font référence au titre d’un livre
américain assez réputé : « No money,
no honey
» – Grossièrement :
« pas d’argent, pas de baise »,
mais, bien sur, dit plus joliment !

Dick, un allemand
revenu de tous les Pattaya, Patpong et Patong de toute la Thaïlande, a trouvé refuge dans la tranquille ville de Udon et me confie,
dégoûté :

 

« Mets ta
maison au nom d’une fille de bar. Le temps de sortir du pays pour renouveler
ton visa, et à ton retour, la maison a
été revendue et la fille s’est tirée. Ou alors elle te demande carrément de
« dégager » vu que la maison
lui appartient. Pas la peine d’aller à la police, les titres de propriété sont
bien à son nom. Plein de mecs ont tout perdu comme ça et se sont suicidés pour
cette simple raison. »

 

Mon vieil ami a
compris la leçon, aujourd’hui, il loue une modeste chambre qu’il partage avec
une jeune enseignante thaïlandaise. (Je pense qu’il existe de jolies
exceptions, toutes les femmes thaïlandaises mariées à des « farangs » ne viennent pas forcement
des bars de Pattaya. Et même là, de jolies
es exceptions, que je vous raconterai demain)

 

A la sortie d’un
restaurant où j’avais diné avec des amies, celles-ci attirent mon attention sur un grand européen
aux cheveux blancs, mains tendues et honteux comme peut l’être un nouveau
mendiant. Poussée par mes amies, je vais
à sa rencontre et l’interroge. Il me dit être Hollandais, marié depuis peu à
une Thaïe à qui il a acheté une maison, habitée par elle- même et toute sa famille. Ses revenus sont modestes
et il a mis toute sa fortune dans ces murs, d’où il est à présent exclu. Il
me souffle, misérable:

 

« On m’a
mis dehors… parce que je ne mourais pas assez vite sans doute. Maintenant je
voudrais rejoindre mon ambassade à Bangkok pour tenter de me faire rapatrier en
Hollande. J’ai tout perdu. Ma femme. Ma
maison. Tout. Et si je mendie aujourd’hui, c’est juste pour l’argent du
bus. »

 

Je lui donne les
300 bahts nécessaires au voyage. Des larmes emplissent ses yeux. Il n’a plus de
famille, plus de maison, plus de rêves.

 

« Mais au moins, je vais mourir chez
moi » conclue t-il.

 

Comme des
milliers d’autres, mon naïf Hollandais a passé ses premières vacances thaïes à Pattaya.
Il a dû se dire, que la
Thaïlande était le Jardin d’Eden,
l’innocence en moins. Tant de filles aux visages et à l’âme fardés, balbutiant
des mots si doux à son cœur de vieux bonhomme deux fois divorcés (c’est la
moyenne des résidents retraités en Thaïlande) ! Combien d’épouses possibles
dans ces « harems » vulgaires de Pattaya,
Phuket, Koh Samui ? Elles sont pléthore, les candidates au mariage avec un
« farang »!

 

« Ja doo
laee » « Je prendrai soin de
toi » murmurent-elles.

 

« I love
you » répond le  « farang »
ébloui.

 

Déjà la
confusion s’installe. Pour « elles », le mariage c’est la sécurité,
ne plus travailler dans la rizière, ne plus se vendre peut-être, et enfin,
assurer la vieillesse de leurs parents. (On peut comprendre toutes ces
raisons !) Pour lui, c’est l’Amour, les sentiments, la romance, donc
l’illusion.

 

Les mots d’amour
ne sont que de la phonétique. Tout comme le français que j’essaye d’inculquer à
mes élèves « d’Udonphit » Comment passer d’une langue tonale sans
grammaire, sans genre ni accords, sans conjugaison, à une langue construite sur
la logique, le raisonnement et l’analyse complexe ? Mystère !

 

Et pour les
sentiments ? Le perroquet dit : « je t’aime »
avec ses jolies lèvres. Le « farang »
exulte : « Oh ! Elle m’aime ! » …

On
meure parfois de trop croire aux paroles sucrées. Mon Hollandais, lui, va
rentrer au pays.

Seul.

Cette note
fait tout naturellement suite à celle d’hier concernant Pattaya et la
prostitution. Elle est extraite de « journal d’une voyageuse »

 

 

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