Des débats linguistiques autour du cinéma ? Oui, pourquoi pas.
A la différence des autres pays, en Roumanie, les films qui passent à la télé ou au cinéma ont un statut spécial. Ils sont diffusés dans leur langue originale, avec sous-titrage. Une pratique dont les raisons sont strictement d’ordre financier, car embaucher des acteurs pour tout doubler nécessite des fonds importants, dont les cinémas et les télévisions ne disposent pas.
A part les dessins animés et les chaînes destinées exclusivement aux enfants, toutes les autres productions étrangères diffusées en Roumanie sont donc sous-titrées. Et les Roumains ne s’en plaignent pas, car les bénéfices en sont nombreux. Le principal avantage du sous–titrage est le fait que l’on a accès constant et dès l’âge le plus tendre aux langues étrangères parlées par des natifs. Avides de télévision et de films en tout genre, la plupart des jeunes roumains commencent à parler l’anglais sans l’aide d’un prof, d’autres comprennent parfaitement l’espagnol, même s’ils n’en connaissent pas les règles de grammaire. S’il y a une dizaine d’années, les télévisions roumaines diffusaient presque exclusivement des films américains et des telenovelas sud – américaines, désormais elles sont obligées d’avoir une proportion équilibrée entre les productions américaines, européennes et autochtones. Par conséquent, les films européens sont de plus en plus nombreux à être diffusés sur les chaînes roumaines, permettant au public d’entendre des langues moins accessibles auparavant, telles que le polonais, le russe, le serbe ou l’allemand. Pour l’instant il est hors question de doubler tous les films diffusés en Roumanie. Et nous espérons même que cela n’arrivera pas trop vite.
Ces jours-ci, en Espagne le débat sur les langues et le cinéma est beaucoup plus vif et plus grave. En fait, le 1er février trois quarts des salles de cinémas catalans ont fermées leurs portes. Les exploitants de ces 75 salles s’opposent à un projet de loi du gouvernement autonome catalan imposant un quota de films sous titrés ou doublés en catalan. Cette future loi régionale, approuvée à la mi-janvier, prévoit d’obliger les distributeurs à présenter dans les salles 50% de films doublés ou sous titrées en langue catalane. Aujourd’hui, l’immense majorité des films étrangers est doublée en espagnol. Ce déséquilibre ne reflète pas la réalité de la Catalogne. Les 7 millions d’habitants de la région autonome sont totalement bilingues et privilégient le catalan dans la vie de tous les jours. Mais pour les cinémas cette mesure coûteuse pourrait entraîner la fermeture de plusieurs salles. Un reportage de Henry Darasse d’Euranet Allemagne.