Clowns, jongleurs, personnages féeriques, musiciens, fanfares, ferme en miniature, ballons colorés, châteaux gonflables, et surtout des centaines de gamins qui ont pris d’assaut le jardin de Cismigiu, au coeur de la capitale roumaine, transformé pour un jour en véritable paradis des enfants.
L’idée porte la signature du Centre de projets culturels de la Mairie de Bucarest, Arcub, qui a défié la crise et les prévisions météo plutôt sombres, faisant du jardin de Cismigiu un univers ludique et coloré où grands et petits se sont éclatés à l’occasion de la Fête internationale des Enfants, célébrée le 1er Juin. Un reportage par Ioana Stancescu.
Après un démarrage plutôt en douceur – avant midi, le parc était presque vide – une ambiance de kermesse a ranimé les esprits des Bucarestois venus se promener dans le jardin de Cismigiu. A part l’euphorie des animateurs, un grand soleil installé confortablement dans le ciel de la capitale a réussi à attirer une foule de parents et d’enfants désireux de prendre une bouffée d’air frais. A leur grande surprise, la fête n’attendait qu’eux.
« Nous avons pris la décision d’aller dans le parc, en sortant de chez le dentiste. On ne savait pas ce qui se passait ici. C’est dommage qu’ils n’aient pas annoncé l’événement. D’ailleurs, ces événements sont souvent passés sous silence. Personne n’est au courant et donc, on arrive à y participer par pur hasard. C’est très beau, mais le monde ignore leur existence. D’ailleurs, c’est valable pour l’ensemble de la capitale. Très peu de publicité. Si on a la chance de tomber dessus, c’est super, sinon, non. Quant à nous, on rentre à la maison pour déjeuner, on prend la caméra et on y revient.»
Entre temps, les Bucarestois, les grands, comme les petits, n’arrêtent pas de s’extasier devant les dizaines d’attractions proposées par les organisateurs. Le parc s’articule autour d’une grande scène animée par des groupes de danseurs et de chanteurs de tous âges. Les allées sont peuplées de vendeurs ambulants de pain d’épices, sucreries, glaces et jus de fruits. Plusieurs Maisons d’Edition offrent des livres pour enfants à des prix fous, tandis que des troupes itinérantes donnent des spectacles sur les grandes pelouses fleuries.
Sous une grosse tente blanche, les organisateurs se frottent les mains. Dans une capitale qui vit la crise, leur initiative est un succès.
«C’est très beau, madame, la météo est avec nous, surtout après l’orage d’hier. Ce projet en est à sa neuvième édition. C’est comme notre enfant. Un enfant qui grandit et qui sera bientôt adolescent. Chaque année, on propose de nouveautés, comme par exemple la mini ferme des animaux. En plus, les acteurs sont différents, leurs numéros sont inédits, mais grosso modo, le squelette reste le même et le public sait à quoi s’attendre. Par rapport aux années précédentes et à d’autres événements qu’on organise, ce projet manque de publicité, faute d’argent. 15000 tracts distribués dans les écoles, un point c’est tout. Pas de budget pour faire de la pub sur les chaînes de radio ou de télé. En plus, ce ne fut que mardi, le 25 mai, que nous avons pris la décision d’organiser l’événement cette semaine, car nous pensions le reporter au 5 ou 6 juin, à cause de la météo capricieuse. Une bonne décision finalement, à voir le nombre impressionnant de gens, le parc est archi plein, mais il est vrai qu’un peu plus de publicité aurait pu faire venir un nombre encore plus grand, surtout d’enfants. Je dois avouer qu’à la différence des années précédentes, cette année, le nombre de spectateurs est inférieur. Le Parc des enfants, c’est notre bébé, un événement qui nous est très cher et auquel on ne renoncerait pour rien au monde.»
Tandis que les organisateurs du Centre de projets culturels de la Mairie de Bucarest se conduisent en parents responsables et veillent au bon déroulement de la fête, les enfants s’éclatent et se sentent rois pour un jour. Si pour la plupart d’entre eux, le 1 Juin c’est une fête, pour d’autres, c’est du sérieux, surtout si leur nom a figuré à l’affiche de l’événement.
A six ans seulement, Maria Valentina est une petite graine de star. Membre de la troupe de majorettes qui a défilé dans les allées de Cismigiu, en ouverture de la fête, elle aspire déjà à faire carrière sur scène. Pourtant, l’innocence de son âge la trahit:
«Moi, j’ai dansé sur la scène, j’ai reçu un diplôme, mais, j’ai raté un autre spectacle, car j’ai attrapé la varicelle. Depuis que j’étais toute petite, je rêve de devenir chanteuse et danseuse. Moi, j’adore danser. Mais, pour le 1 Juin, je voudrais aller à la piscine, me baigner avec maman et papa.»
Les ballons, les personnages des contes de fées, les comédiens costumés n’impressionnent pas tout le monde. Les plus âgés surtout restent fidèles à l’image du jardin – univers des plantes et des fleurs. En plus, ils remarquent sur le coup que l’argent fait toujours la différence.
«L’année dernière c’était mieux, c’était mieux organisé, j’ai apprécié la présence de la Gendarmerie roumaine qui avait invité les petits à monter à cheval. En plus, l’année dernière il y avait des spectacles de théâtre pour les enfants, Le chat botté, par exemple. Cette année, il y a trop de monde et pas d’organisation. Mais bon, on n’a pas encore tout vu. Petit bémol: les préparatifs ont commencé vendredi dans la journée. Mais, vendredi soir, on a pulvérisé des insecticides contre les moustiques et vous imaginez toutes ces substances qui se sont déposées sur les produits alimentaires que vous voyez tout autour. »
Les rouspéteurs, qu’ils se taisent, affirment les enfants à l’unisson. Car eux, ils adorent tout ce qui se passe autour d’eux. Surtout que de tels événements, sont assez rares dans la capitale roumaine. Si la Municipalité a pensé offrir aux petits Bucarestois une fête en bonne et due forme pour marquer ce premier Juin, maintenant ce sera le tour des parents de choisir parmi la multitude des cadeaux celui auquel rêvent leurs gamins. Et les enfants sont de gros rêveurs. Cristi, 5 ans.
«Pour le 1 Juin, je voudrais recevoir un jouet, mais je ne sais exactement quoi.»
Plus pragmatiques dès la plus tendre enfance, les fillettes savent très bien ce qu’elles veulent. Alice, 4 ans:
«Je voudrais recevoir nombre de cadeaux, des poupées, des accessoires, et une maison de poupée.»
Pourtant, en ce premier Juin, notre petite demoiselle des idées plein la tête se déclare contente de faire des dessins sur l’asphalte dans le beau jardin de Cismigiu. Transformé pour un jour en un immense centre de loisirs, notre beau vieux parc a tous les atouts pour rendre heureux même les plus prétentieux.
Ioana Stancescu