L’islam en Roumanie est pratiqué par environ 0,3% de la population et il y est présent depuis presque 700 ans, notamment dans le nord de la Dobroudja, une région baignée par la Mer Noire sous occupation ottomane presque cinq siècles durant – de 1393 à 1878).
La Roumanie compte environ 58 000 musulmans, des sunnites pour leur plupart. 85% des musulmans d’origine turque et tatare vivent dans le département de Constanta en y formant 6% de la population totale. Ils sont représentés au Parlement par l’Union démocratique des Tatars turco-musulmans de Roumanie. Le centre culturel de l’islam roumain reste la ville de Constanta et c’est dans la ville de Mangalia que se trouve l’une des plus grandes mosquées roumaines, construite en 1525.
Après l’instauration du régime communiste, c’est-à-dire à l’issue de la Seconde guerre mondiale, la communauté musulmane de Roumanie s’est trouvée dans une situation délicate : fermeture des écoles turques et tatares en 1957; fermeture, en 1967, du « séminaire musulman » de Medjidiya, seul établissement de ce genre dans le pays, préparant le renouvellement des cadres religieux; inexistence de publications religieuses musulmanes; impossibilité de prendre part au pèlerinage à la Mecque. Après 1972, la situation internationale et les difficultés économiques du pays avaient cependant fini par pousser les autorités roumaines à accorder quelques concessions à la communauté musulmane, mais ces concessions ne visaient naturellement qu’à améliorer l’image de marque du régime auprès de certains pays arabes et musulmans.
On a peu d’informations sur les conséquences de la chute du régime des Ceausescu sur la situation actuelle de cette petite communauté. Tout ce que l’on sait pour l’instant est que l’ancien müfti, un homme très, âgé, accusé d’avoir collaboré avec l’ancien régime a été remplacé, et qu’une nouvelle revue musulmane locale, intitulée Karadeniz (« La mer noire »), paraît depuis plusieurs années. Il y a eu aussi, avant 1992, plusieurs prises de contacts avec les autorités musulmanes des pays voisins, et notamment avec celles de l’ex-Yougoslavie, à Skopje, Prishtina et Sarajevo.
A la fin, je voudrais vous proposer, chers amis, une petite incursion dans la civilisation musulmane de chez nous. Voici pourquoi, je vous proposer de boucler vos valises pour nous rendre ensemble à Babadag, en Dobroudgea.
La région de Dobroudja, située dans le sud-est de la Roumanie, plus précisément entre le Danube et la Mer Noire, a connu une histoire tourmentée. Habitée depuis la nuit des temps, elle subit tour à tour les dominations grecque, romaine et byzantine. La longue occupation turque qui dura jusqu’à la fin du XIX-ème siècle, le 14 novembre 1878, plus précisément, et la présence de colons turcs et tatares allaient conférer à la Dobroudja des traits orientaux. Mais ce n’est pas de la région dans son intégralité que nous parlerons aujourd’hui. Comme je viens de vous le dire, nous allons nous arrêter sur la ville de Babadag. Sise dans une zone boisée, à 8 km de la Cité moyenâgeuse d’Enisala, la ville est un des passages obligés du tourisme culturel dans ces parages. Voici un bref historique de la ville de Babadag, tel qu’il nous a été présenté par l’archéologue Aurel Stanica que je cite: “tout commence vers l’an 1260, lorsqu’une population turque s’installe aux alentours de l’actuel emplacement de la cité de Babadag. Le nom turc de la ville, conservé depuis le XIII-ème siècle, signifie “ Le Mont du Père” ou “ Le Mont du Vieillard”. C’est vers 1420, après que les Turcs se furent emparés de la Dobroudja, que commence l’essor de la cité de Babadag. Celle-ci devient même capitale de la nouvelle province, car les sultans ottomans de passage par la Dobroudja se plaisaient à y résider. La construction de toute une série d’édifices remonte à cette époque-là”.
La mosquée Gazi Al-Pasha compte parmi les édifices emblématiques de la ville de Babadag. C’est le général Gazi Al-Pasha, commandant de l’armée dont le garnison s’installe à Babadag qui va décider dans son testament rédigé vers 1600 de financer la construction de cette mosquée au centre – ville. Selon les témoignages de plusieurs voyageurs étrangers, la ville comptait jadis un nombre impressionnant d’églises et de mosquées. La mosquée Gazi Al- Pasha est sans doute l’édifice le plus précieux entre tous ceux que l’on peut admirer aujourd’hui encore. C’est à cette même époque que l’on a dressé une auberge, à l’intention des voyageurs et des marchands de passage à Babadag. Vers la fin du XIX-ème siècle beaucoup des vieux bâtiments ont été détruits pour faire place à de nouvelles constructions, sauf que ces dernières vont partager le même sort, puisque démolies et remplacées, sous le régime communiste, par des HLM”.
Plus de la moitié des habitants de Babadag est d’origine musulmane. Qu’il s’agisse de Turcs ou de Tziganes turcs, ils sont tous descendants des conquérants turcs du XIII-ème siècle. Le reste de la population de la ville est majoritairement représenté par les Roumains, auxquels s’ajoutent les Russes lipovans. On peut dire que Babadag est un véritable modèle de cohabitation interethnique”.
Ioana Stancescu
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