Kosovska Mitrovica (ou Mitrovicë, ou Mitrovica en serbe pour distinguer cette ville de celle de Srem Mitrovica) est la seconde ville du Kosovo située à 50 km à peine de la capitale Prishtina… Longtemps, son pont disputé par les Serbes et les Albanais du Kosovo fut symbole de division.
Kosovska Mitrovica, l’impossible cohabitation entre serbes et albanais?
Si vous connaissez cette ville de Kosovska Mitrovica au moins de nom, c’est parce que dans cette région qualifiée par les médias d' »enclave » du Nord, vit l’essentiel de la minorité serbe aujourd’hui inquiète de son sort et plus encore depuis la déclaration unilatérale d’indépendance… Kosovska Mitrovica, plus que jamais, est devenue le symbole de la division et de l’impossible cohabitation…
Quand on vient de Prishtina, on rejoint Kosovska Mitrovica par une large route où l’on découvre un autre visage que celui de la reconstruction d’hôtels et de maisons de luxe entre la frontière macédonienne et Prishtina! Kosovska Mitrovica n’est pas une destination touristique, mais plutôt une expérience où l’on découvre toutes les crispations de la question kosovar et de la difficile cohabitation entre les Albanais du Kosovo, la minorité Serbe et la minorité tzigane, peut-être encore plus marginalisée dans des bidonvilles et des quartiers miséreux. Il me semble impossible d’aller au Kosovo et de ne pas passer par Mitrovica et l’enclave du Nord, où est concentrée, non sans difficulté la minorité Serbe, que le gouvernement de Belgrade tente de convaincre de résister à coup de faibles moyens financiers.
A Mitrovica, une partie de la population n’a pas d’électricité et les relations restent électriques sans jeu de mot, surtout depuis la déclaration unilatérale d’indépendance, qui fait craindre que les minorités serbes ne soient plus en sécurité malgré la présence des forces de la Kfor pour assurer leur protection….
Kosovska Mitrovica; une ambiance étrange et dérangeante
Bien sûr, la ville de Kosovska Mitrovica pourrait sembler très sage, si on ne ressentait pas l’atmosphère bizarre, pesante, d’une tension implicite entre les habitants qui parlent peu, observent dans un silence déconcertant nos visages de touristes étonnés et curieux, à peine voyeurs… Puis vient un sourire chez un passant qui ose briser un peu cette méfiance et nous demander « Francia »? Nous répondons « Oui » avec un large sourire et une certaine conscience de représenter pour cet homme une espèce de mirage, de rêve inaccessible. « Ah Paris Paris »? Ce n’est pas de Paris que nous venons, mais nous n’avons pas envie de lui gâcher le plaisir que lui inspire ce nom…
La seule église serbe orthodoxe, cathédrale surplombant la ville et construite dans la tension, côtoie pas moins de 7 mosquées, comme si de rien était, mais jusqu’à quand?
A l’entrée de Kosovska Mitrovica, comme dans les villages aux alentours, les rues sont encore en terre et la récente pluie a produit des monticules de boue dans lesquels jouent les enfants, encore chanceux d’avoir un toit sur leur tête… La vie a repris le pas sur les bruits de mitraillettes, les chars et même les voitures de la Kfor ou de la Sfor très présentes pour assurer la sécurité dans cette zone ultra sensible se font plus discrètes… Il faut dire que pour les habitants, elles font partie du paysage !
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Très bel article sur une ville martyrisée que je n’aurais pas envie de visiter. Trop triste et trop de souffrance pour les Serbes et les Chrétiens qui ont vu leur ville, leurs églises, disparaître en partie. C’est fou ce que tu connais admirablement toutes ces régions du centre de l’Europe. On sent ta curiosité sollicitée en permanence, ce qui donne tant d’intérêt à ce site.
Chère Armelle, je ne dirais pas que nous avons eu envie (avec mes parents) de « visiter » Mitrovica, mais disons qu’à l’occasion de ce voyage transfrontalier dans les pays d’ancienne Yougoslavie, le Kosovo s’est imposé comme une évidence. Plutôt que de le contourner pour l’éviter, nous avons eu envie de le traverser pour nous donner les moyens de comprendre ce qui s’était passé, comment on y vivait. Des moyens aussi modestes que superficiels, mais nous avons en quelques jours pu appréhender beaucoup les tensions dans des petits détails du quotidien et encore plus selon les personnes serbes ou albanaises (pas tziganes car ils sont inapprochables et ce n’est pas souhaitable, seul sans parler la langue). Par exemple, les serbes nous ont mis en garde sur les quartiers albanais comme sur les Albanais d’Albanie où ils voulaient nous décourager d’aller, de manière implicite mais assez évidente. Rien à voir au niveau de l’atmosphère entre les zones serbes et albanaises. A l’époque, c’était encore plus étrange, car on sortait depuis peu de la guerre et contrairement à Mostar découverte après la guerre de Bosnie puis cinq, dix et quinze ans après, nous n’avions pas l’impression qu’une guerre était passée, du moins, nous ne l’aurions pas su visuellement en dehors de la destruction des églises serbes et des maisons des villages alentours sur la route menant à Prishtina. Nous ne le savions pas à l’époque, mais le pont était vraiment un lieu très dangereux, contrôlé par la KFOR. Nous l’avons appris en discutant ensuite. A ce moment là, il pouvait se produire des drames ou des crimes sur ce pont selon que l’on était serbe ou albanais. Surtout serbe.
Dans la liste de photos qui suit ce billet, la 3ème photo intitulée « Petite Bosnie » est en réalité une photo du quartier des Trois Tours, situé au Nord-Ouest du pont (Petite Bosnie se situe au Nord-Est du pont).
En savoir plus sur Petite Bosnie : un article dans la revue de géographie EspacesTemps
http://www.espacestemps.net/
En savoir plus sur les Trois Tours et sur les différents quartiers de Mitrovica :
http://geographie-ville-en-guerre.fr.gd/Photographies–d–les-quartiers-de-Mitrovica.htm