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Madame de Pompadour, Marquise de Pompadour, fut la première dame officielle à occuper l’Elysée. C’est en 1753 que le roi Louis XV achète ce qui s’appelait encore l’hôtel du comte d’Evreux pour en faire la résidence parisienne de la marquise de Pompadour, une de ses favorites. La favorite, n’écoutant que son bon plaisir y fera des travaux dispendieux à la charge du royaume.
Le vendredi de Noël, le service public télévisuel fit de louables efforts pour sortir de l’ombre Louis XV. Un téléfilm de qualité en prime time suivi d’un documentaire. Hélas, qui connaît Louis XV ? Ses feux ne sont guère venus jusqu’à nous, bien moins que ceux des philosophes des Lumières et de la marquise de Pompadour qui les a favorisés.
Malgré le casting avantageux mettant en scène un acteur séduisant aux canons de notre époque, en dépit d’une narration pédagogique et des dialogues qui l’étaient même quelquefois trop, on ne retint pas grand chose de ce monarque coincé entre son arrière-grand-père le Roi-Soleil et son petit-fils Louis XVI, plus connu bien que n’ayant régné que 15 ans. Ce roi-là ayant peu marqué l’histoire, ce sont les traits les plus touchants de sa personnalité que la chaîne France 2 s’employa à nous montrer avec cette conclusion que le monarque à la fin de son existence redevint un homme, rien qu’un homme. Mais, la réalité, c’est qu’il ne put jamais dépasser cet état. Opposé aux privilégiés et aux parlements, il ne put faire passer la moindre réforme malgré ses intentions d’établir la justice fiscale. Il n’était pas fait pour l’Etat, contrairement à son prédécesseur qui l’incarnait (« L’Etat c’est moi » au sacrifice de toute vie privée).
« Pathétique » serait le mot pour qualifier Louis XV qui n’est pas sans excuses. Il est vrai que la mort décima sa famille royale et qu’il se retrouva seul face à la lourde tâche de reprendre le flambeau laissé par celui qui éblouit l’Europe donc le monde de ses fastes et de sa grandeur. Le jeune Louis XV fut très tôt gagné par une dépression quasi permanente, enfin de « mélancolie » comme on disait alors, fuyant le pouvoir et se réfugiant auprès des femmes. Il faillit mourir d’un mal non identifié (peut-être lié à la canicule) l’été 1744. Il gagna alors les faveurs du peuple qui le surnomma le Bien-Aimé.
Mais à peine remis et comme surpris par cette renaissance inattendue (on s’apprêtait à lui donner les derniers sacrements et, lui, se préparait donner son ultime confession), il se lance de façon suicidaire – ou héroïque c’est comme on veut- dans la guerre à la bataille de Fontenoy. Le dernier roi guerrier aura au moins un fait d’arme spectaculaire à son actif. Sauf que la citation célèbre qu’en retire l’historien est du comte d’Anterroches (« Tirez les premiers, messieurs les Anglais !« , version enjolivée des mots d’ origine). Et pour Louis, c’est encore raté pour la postérité !
Selon Napoléon, qui s’y connaissait en bataille, Fontenoy n’aurait pas été gagnée si le monarque n’avait pas fait le choix de rester en avant-poste sous les boulets de canons qui pleuvaient. Cela a galvanisé ses troupes.
Hormis ce fait exceptionnel, Louis XV est si effacé dans la mémoire des Français que la littérature et le cinéma ne s’en sont guère occupé. Un film de Bertrand Tavernier, « Que la fête commence ! » préfère même s’inspirer du régent Philippe d’Orléans qui régna en débauché lors de la prime enfance de Louis XV. La fin du film montre une jeune fille révoltée par le décès accidentel de son petit frère provoqué par la précipitation du carrosse du régent. Le regard de la jeune fille est si intense que l’on pense à l’imminence de la Révolution. Ainsi, cette scène fait-elle un pont par-dessus 59 ans de règne de Louis XV, non plus le Bien-Aimé mais Louis XV l’Insignifiant, l’Ignoré.
Si le téléfilm avait pour but de faire sortir ce roi de l’oubli, il a surtout mis en exergue le déclin de la monarchie absolue et de l’Etat, et la montée des idées novatrices en particulier des philosophes des Lumières. Car si Louis XIV fut nommé le Roi-Soleil, sous son successeur ce sont les Lumières qui ont brillé sur l’Europe, favorisées par l’obscurité des querelles religieuses, et un Malesherbes censeur royal mais favorable à l’émancipation des idées. Et bien entendu par Madame de Pompadour, nous y venons.
Jeanne Poisson est une roturière. Elle est mariée et son obscur époux devra s’effacer devant le roi lorsque ce dernier s’éprendra de cette femme en 1745 et la fera marquise la même année. Jeanne Poisson aurait pu même être duchesse si elle n’avait refusé le titre en 1752. La marquise de Pompadour sera fidèle au roi durant vingt ans bien que les relations physiques aient cessé après quelques années. Elle sera aussi respectueuse envers la reine. On retiendra surtout qu’elle fit entrer les philosophes des Lumières à Versailles et qu’elle favorisa la publicité de leurs écrits.
La Pompadour ne fut pas seulement la protectrice des Lumières. Elle devint la confidente du roi et l’organisatrice des rencontres et fêtes galantes de Sa Majesté.
Ainsi cette roturière parvenue effaça de l’Histoire près de 60 ans de règne du roi Louis XV, et marqua davantage la postérité que celui-ci. Elle connut même l’insigne privilège de mourir à Versailles, privilège qui était réservé au roi. Les hôtes de l’Elysée peuvent donc dormir tranquilles, le fantôme de la marquise de Pompadour ne hante pas les lieux.