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Palmerston: 48 habitants, une dynastie hospitalière, alizés et secrets

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Après trois jours sur le bateau du Capitaine Crouille, ci-devant l’atoll de Palmerston.

J’entends déjà force questions et exclamations qui transpercent la Toile : c’est où ça ?

Je ne vais pas certainement pas m’appesantir sur la question. L’atoll se situe à 500 kilomètres au Nord-ouest de Rarotonga, à l’Est de Niue, au Sud de Souwarrow.

En clair, au milieu du Pacifique Sud.

Mais quand on accoste enfin sur la plage immaculée de l’atoll, il est clair que nous sommes au milieu d’un problème qui se nomme Graham Wragg, alias Capitaine Crouille. Encore lui, sacrebleu !

Oui. Immédiatement pris en charge par la petite communauté insulaire qui vit depuis cinq générations sur l’atoll, Simon, le chef d’un des trois clans pousse une diatribe contre le capitaine. Selon lui, le capitaine n’est pas le bienvenu. Hors de question également de faire de la plongée. Le capitaine Crouille n’a pas informé de notre visite, ou il y a malentendu, on ne sait pas trop. Il est huit heures du soir, et la terre si promise est soudainement assez inhospitalière.

 

Mais comme nous sommes en Polynésie et que nous sommes des visiteurs, tout s’arrange. L’hospitalité légendaire des Polynésiens n’est pas une vue de l’esprit. Un repas pantagruélique nous rassasie, l’accueil est chaleureux, la nuit est bercée par les doux alizés, la pleine lune, un lit sur la terre ferme, le bruit du générateur, les cloches à quatre heures du matin.

En 1863, William Marsters, un jeune aventurier originaire du Leicestershire s’installa sur l’atoll avec ses trois épouses polynésiennes originaires de l’atoll de Penrhyn et y fonda une micro colonie métisse. En 2011, les trois familles se partagent l’atoll. Les 48 habitants descendent tous d’une des trois épouses de William Marsters. D’après le bon sens, les mariages inter-familiaux sont désormais interdits. La dynastie Marsters est aujourd’hui disséminée dans les autres îles et également en Nouvelle-Zélande.

 

L’île est dirigée par le maire du conseil insulaire. Tous les habitants parlent un anglais parfait.

En l’espace de quelques heures, on partage tout avec les insulaires. Les toilettes, les chambres, les lits, l’eau (une denrée rare et précieuse) et bien entendu la nourriture. On se sent adopté. On se sent chez soi. On se sent bien chez nos nouveaux amis. Après trois jours de galère de bateau, cette famille d’accueil sur cet atoll qui manque de tout est devenue un havre de bonheur.

L’atoll n’est ravitaillé que de temps en temps. Depuis trois mois, les habitants attendent des denrées précieuses : du savon, de diésel, des fruits frais, des boîtes de conserve. Il n’y a pas grand-chose à Palmerston. Sauf le sens de l’hospitalité, l’humour et la gentillesse pure et simple.

Le lendemain, direction un des motus pour une détente pique-nique et baignade. La famille qui nous accueille prépare en un tournemain des poissons grillés dans un four à même le sable, agrémentés de noix de coco fraîche et de toutes sortes de plats polynésiens tous aussi succulents les uns que les autres.

 

Au retour, les visages sont contents. Mais la solitude des insulaires se voient dans leurs yeux. Comme dans beaucoup d’îles isolées du Pacifique, il y a un côté sombre. Il y a le manque d’opportunités pour les jeunes, la distance, l’absolue nécessité de s’exiler ailleurs pour survivre, le diabète qui fait des ravages, la difficulté de rencontrer l’âme sœur, les secrets cachés de la violence conjugale et envers les enfants.

Ces secrets, malgré la loi du silence omniprésente sur cet atoll comme ailleurs dans le Pacifique, commencent à s’effriter au fur et à mesure que les communications s’améliorent. Le téléphone, Internet permettent désormais à quiconque à porter plainte et à se battre contre l’omerta des îles isolées.

 

Déjà, il faut partir. Le capitaine Crouille — qui n’a fait qu’une brève apparition sur l’atoll tellement sa présence semble persona non grata – veut appareiller avant le coucher du soleil. Il faut dire adieu à Stella Neale (laquelle fera l’objet d’un prochain billet), à Kai et ses enfants, à Simon.

« Please come again ». Telle est la phrase d’adieu la plus entendue. On répond « oui, bien sûr, sans doute, un jour peut-être ». Mais les cœurs sont serrés.

Le mien est serré. J’imagine l’existence de ces douces personnes dans des habitations sinistres des cités grises de Nouvelle-Zélande. J’imagine la douleur des mamans qui ne peuvent pas voir leurs petits-enfants. La terreur de vivre en autarcie, loin de tout, lorsque la pluie manque, que les vivres viennent à manquer, que le cyclone tant redouté détruise tout sur son passage. Ces gens d’une journée sont devenus proches, elles ont donné tout ce qu’elles avaient moyennant une modeste participation financière.  

Je sais bien que je ne reviendrais pas. Je ne reverrais jamais l’atoll de Palmerston.

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