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Autopsie d’une illusion

goutte d'eau sur une branche

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Répétition toujours et encore. J’attends. Je parle dans le vide. Je me perds pour essayer de me retrouver. Je viens de comprendre que toute relation est essentiellement transitive et que je suis toute seule. Quand je sonde le bruit du silence de ma vie, l’écho du manque et de la solitude enfle et est si violent qu’il résonne au plus profond de mon corps et me renvoie à mes fantômes… Pourquoi ressentir autant l’absence alors que ces fidèles compagnons m’habitent et se chargent de me rappeler qu’ils ne lâcheront jamais leur emprise? Malgré mes prétendues armures, habilement et inlassablement, ils tissent leurs toiles inextricables, comme s’ils ourdissaient l’intrigue de mes échecs depuis toujours, avec un malin plaisir à me voir sombrer et creuser en moi la tombe de mes illusions et de mes espérances désormais perdues…

Les fantômes sont là, à chaque instant, aussi puissants que sournois ; ils peuplent mon imaginaire de leurs ténèbres, ils s’emploient à toutes sortes de variations, ils élaborent leurs stratégies pour semer le trouble et me réduire à la transparence, ils assument leurs desseins sans se soucier de mon devenir, transforment l’absence en évidence, la solitude en habitude et l’ennui n’est jamais qu’un refrain implacable de mes renoncements à vivre. De mes erreurs passées, présentes et déjà à venir… Je chemine dans les affres de mes souvenirs, des échanges nourris d’espoirs solitaires, des émotions intenses qui faisaient de l’attente une perspective merveilleuse et de la rencontre un aboutissement éphémère pour construire peut-être une histoire commune.

Et pourtant, pour une fois, dans la tempête du silence, l’errance est presque aisée. J’explore le labyrinthe de mes incohérences, de mes oppositions et de mes aspirations intimes en me demandant où j’ai failli. De l’extérieur rien y paraît. Tout est si intangible. Je m’efforce de tout cacher à tel point qu’on ne me voie pas. L’Autre a choisi la fuite. Comme toujours. Il a sûrement compris ce que tous les autres ne perçoivent, ne voient, n’entendent et ne ressentent même pas. Il n’a même pas cherché à faire diversion. Je suis invisible. Il m’a effacée sans que je comprenne pourquoi? La peur serait-elle sa sage conseillère? Son mutisme répond à mes interrogations et fait de mes intuitions de funestes messagères. Je les redoutais mais n’ai pu les éviter plus longtemps, son silence leur a donné vie.

J’évolue au rythme des petites voies de mes fantômes qui me guident en terrain bien connu. Ma hantise met en scène des énergies contradictoires. Quand j’ai cru qu’un Ailleurs était possible, je ne concevais pas l’indifférence comme seule réponse envisageable à ma demande. J’entrevoyais l’hypothèse de la conciliation. J’ai imaginé l’exil presque bienveillant pour une fois, je me suis autorisée quelques instants à exister finalement hors de ma vie comme si ce souffle inespéré, venu d’on ne sait où, avait ouvert un horizon désirable et en apparence accessible en dépit de la distance infinie.
Mais les instants précieux chargés de complicité consentie et choisie, se brisent tels les ressacs sur les rochers de la réalité.

Les mots qui sont venus, comme ceux qui n’ont jamais pu naître, s’aiguisent tels des lames fouillant dans mes songes pour mieux les laminer. Ils sont autant de mensonges trompeurs. Les désirs enfouis ne produisent plus de convulsions, ne me rendent plus fébrile et ne m’attristent plus vraiment ; ils sont déjà devenus dérisoires. Les rêves moribonds ne me donnent plus le vertige, ne provoquent plus les regrets, l’amertume ou la colère. Les coups de poignard ne torturent plus mes entrailles. Les tressaillements et les torsions de mon corps ne déclenchent pas la décision du sursaut comme acte de délivrance. Ils ne m’angoissent plus, comme s’ils étaient devenus si ordinaires que leur résonance était une simple variation de la douleur du souvenir. La rupture a opéré son savant travail de destruction pour que jamais le désir et l’espoir ne renaissent. Je reste infirme.

L’urgence d’une autre vie n’opère plus de façon aussi irrépressible malgré la persistance de la souffrance de l’incompréhension et du sentiment d’injustice face au rejet et l’abandon. … Suis-je en passe de gagner le combat du renoncement et de l’acceptation? Je me leurre sûrement. Ce serait trop facile… C’est comme si à chaque tentative, j’écrivais une histoire ni tout à fait différente, ni vraiment identique…

8 Février 2017.

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